Résumé de la 1re partie n L'homme qui l'épiait et à qui Louise adresse la parole, s'enfuit et disparaît dans les broussailles... Le soir même, à la ferme, elle est reçue avec quelque méfiance (une femme de la ville et seule, en plus, dans un tas de ruines !). A force de sourires et d'explications, Louise arrache à ses voisins la promesse de quelques œufs et d'une volaille de temps en temps. Elle est arrivée à l'heure de la soupe, mais personne ne lui propose une assiette. Il y a là le fermier, son épouse, un fils et un garçon de ferme. Seule la femme répond à Louise ; les trois autres, les hommes, ont grogné un vague salut et replongent le nez dans leur assiette.. Le visiteur de Louise n'est pas là. Alors elle questionne. «J'ai aperçu un homme, ce matin, assez jeune, une vingtaine d'années, costaud, avec des cheveux très courts, vous le connaissez ? — Ça se peut. — Il s'est sauvé quand je lui ai parlé ! Je lui ai fait peur ? — Allez savoir... — Qui est-ce ? — Possible que ce soit Lucien. — Y a-t-il d'autres habitants, par ici ? — Personne. — Alors, c'est lui ! Il n'est pas là ? — Ça se voit, qu'il n'est pas là !» La femme n'a rien d'aimable. Debout, son torchon sur l'épaule, elle attend manifestement le départ de la visiteuse qui insiste naïvement. Louise est persuadée qu'il faut vaincre la méfiance, forcer les autres à communiquer, devenir des amis. C'est un besoin d'harmonie illusoire et une profonde méconnaissance des différences de coutumes et de cultures. «Je vous demandais ça parce que si quelqu'un chez vous voulait travailler un peu, du bricolage chez moi, des choses qu'une femme a du mal à faire, vous comprenez ? Eh bien, je paierai, bien entendu. Remarquez, il n'y a pas grand-chose, juste un peu de maçonnerie autour de la fenêtre et puis la porte qui ne ferme pas. Pour le reste, je me débrouille assez bien. J'ai tout passé à la chaux et j'ai repeint les poutres en rouge, c'est amusant. Mais pour la porte, qu'est-ce que vous en pensez ? Faut voir un maçon pour ça, ici on a du travail. — Même le dimanche ? Je suis sûre qu'un dimanche ou deux suffiraient. Je paierai bien, et puis tiens, si ça vous amuse, je ferai le portrait de celui qui voudra. Peut-être vous, madame ? Vous avez un visage tout à fait intéressant j'aimerais faire du portrait, pourquoi pas, n'est-ce pas ? Bon, vous réfléchirez, ça ne presse pas, l'hiver n'est pas encore là. Ah ! j'oubliais, est-ce que vous auriez un peu de lait pour mon chat, j'ai épuisé la réserve et le pauvre adore ça. C'est mon seul compagnon, voyez-vous.» Elle parle, elle parle, Louise ! Elle qui prétend rechercher la solitude ! Enfin, elle se résigne à partir nantie d'une petite bouteille de lait. C'est alors que survient l'un des rares témoins de l'histoire de Louise : c'est un fermier, habitant des terres distantes d'une dizaine de kilomètres. Il est venu parler des récoltes et des problèmes de stockage. Il salue Louise avec un peu d'étonnement sur le pas de la porte et reçoit un large sourire en réponse. Il se souviendra parfaitement d'elle : assez petite, cheveux blond-roux, en chignon, des yeux clairs, une peau claire, des tas de bracelets aux poignets et une robe pas ordinaire, longue avec des couleurs et des volants. Une jolie petite femme, dira-t-il, bien aimable mais bizarre tout de même. A suivre Pierre Bellemare