Bilan - Une personne a été tuée et au moins huit autres blessées hier, vendredi, dans le sud-est de la Turquie, lorsque l'armée a tiré en l'air pour disperser quelque 300 manifestants qui dénonçaient l'agrandissement d'un camp militaire. La victime a été tuée dans des circonstances encore indéterminées lors de l'intervention des soldats dans la localité de Lice, dans la province de Diyarbakir, ont précisé des sources sécuritaires. L'agence de presse kurde, Firat News, a confirmé la mort d'une personne, précisant que l'armée avait commencé à tirer alors que les manifestants avaient mis le feu à plusieurs tentes du chantier et attaqué les forces de l'ordre en lançant des pierres et des cocktails Molotov. Dans ce contexte, le ministre turc de la Communication, Binali Yildirim, a critiqué durant cette même journée le rôle joué par les réseaux sociaux dans la fronde antigouvernementale des dernières semaines, les sommant de coopérer avec les autorités turques sous peine de sanctions. «Oui aux libertés jusqu'au bout et à l'utilisation de l'Internet, mais non, absolument non à ce qu'il serve de moyen pour le chaos, la violence et le crime», a déclaré M. Yildirim lors d'une réunion à Kars (est). Les plateformes comme Twitter et Facebook ont été largement utilisées pour la mobilisation des manifestants. Lundi déjà, le même M. Yildirim avait déploré que le site de micro-blogging Twitter ait refusé de coopérer avec les autorités turques au moment des manifestations, notamment pour identifier leurs instigateurs. Son collègue de l'intérieur, Muammer Güler, avait annoncé le 17 juin que le gouvernement travaillait à l'élaboration d'une loi permettant de poursuivre les internautes publiant des messages diffamatoires ou incitant à la révolte sur les réseaux sociaux. Ces incidents surviennent alors que le gouvernement islamo-conservateur turc a été confronté à sa plus grave contestation depuis son arrivée au pouvoir en 2002. Partie le 31 mai d'une mobilisation contre la destruction d'un jardin public d'Istanbul, le parc Gezi, le mouvement s'est muée en une vaste fronde politique qui avait, le week-end dernier, rassemblé plus de 2,5 millions de personnes dans près de 80 villes du pays, selon les estimations des services de police. Le sud-est du pays, à majorité kurde, a été largement épargné par cette contestation, qui a essentiellement touché Istanbul, la capitale, Ankara et Izmir (ouest). Depuis l'évacuation manu militari le 15 janvier par la police de leur bastion du parc Gezi, les manifestants ont très largement opté pour des actions plus pacifiques, comme l'organisation de forums de discussion dans des parcs. Seul Ankara continue à être le théâtre d'affrontements réguliers et nocturnes entre la police et les contestataires. La répression de la fronde a été très critiquée dans le monde entier et a écorné l'image du Premier ministre, Recep Tayyip Erdogan. Selon le dernier bilan de l'association des médecins turcs, ces manifestations ont fait quatre morts, trois contestataires et un policier, et environ 8 000 blessés.