La colère est à son paroxysme dans la localité de Fréha où la population exige l'expulsion, en l'espace de quelques jours, d'un deuxième imam. Ces hommes de culte sont accusés d'avoir introduit de nouveaux rituels étrangers à nos pratiques et traditions. L'action est presque unique en son genre. Les habitants du grand village Imzizou, relevant de la municipalité de Fréha, à 35 km à l'est de Tizi Ouzou, manifestent leur colère sur la place publique et comptent passer à l'acte d'expulsion de l'imam du village si ce dernier refuse de partir de son propre gré. C'est ce que nous avons appris des villageois qui, sous la houlette du comité de village, observent, depuis ce matin, un rassemblement devant le siège de l'APC de Fréha. Aux premières heures de la matinée, ils étaient déjà quelques dizaines à se rassembler devant le siège de l'APC et leur nombre grossissait au fil des minutes. «Nous voulons rencontrer les autorités locales et exiger le départ de l'imam de l'ancienne mosquée du village après le départ de celui qui officiait dans la nouvelle mosquée», nous dira un membre du comité de village contacté ce matin par téléphone. Une sorte de malaise était déjà palpable depuis l'inauguration de la nouvelle mosquée indiquent les villageois, qui accusent l'imam de l'ancienne, récemment affecté par la direction des affaires religieuses, d'être d'obédience salafiste. Mais si jusque-là les choses se sont déroulées dans les normes, c'est un autre tournant qu'elles ont prises depuis la semaine dernière. Tout a commencé avec le décès d'un habitant du village. Ce jour-là, les deux imams n'ont pas pu se mettre d'accord sur la façon dont ils devaient observer et exécuter le rituel et la prière des morts, en raison de nouvelles et inconnues traditions qu'ils voulaient instaurer. Ne voulant pas perdre de temps, les villageois ont fait appel à un autre imam d'un autre village qui a dirigé le rituel dans le strict respect de la tradition kabyle. Après l'enterrement, les villageois ont organisé une assemblée générale à tajemaât du village, vendredi dernier, pour étudier la nouvelle donne. Suite à quoi, ils ont lancé un ultimatum aux deux imams de quitter les lieux. L'ultimatum expire demain, vendredi. Depuis, l'imam de la nouvelle mosquée a quitté les lieux et les fidèles continuent à prier comme ils l'ont toujours fait avant. Quant au deuxième, il «tient tête aux villageois» selon le vocable utilisé par ces derniers. Il est allé jusqu'à nous dire : «Je ne partirai pas même avec des chars», avoue un villageois contacté ce matin à ce propos. Le comité de village dit dégager toute responsabilité de ce qui pourrait arriver après l'expiration de l'ultimatum, surtout que les innombrables démarches entreprises depuis une semaine pour obtenir le départ de l'imam sont restées vaines. Aussi, le rassemblement d'aujourd'hui se veut comme la dernière étape avant l'acte d'expulsion, indiquent les villageois.