Résumé de la 85e partie - M. Deval se présente chez le médecin avec une lettre de Mme Boitard dans laquelle elle révèle à son amant qu'elle a un cancer du sein... Ce matin, je n'avais aucune raison, docteur, de reconnaître devant vous que Jeanne était ma maîtresse depuis deux années... Une maîtresse admirable que j'adorais ! Ça ne regardait ni vous ni personne ! Quand vous m'avez annoncé l'horrible nouvelle, j'ai dû faire un effort surhumain pour sauver la face. Il était inutile de faire un aveu qui ne changerait plus rien. En un éclair de pensée, j'ai pu mesurer tout ce qui serait dit d'inique et de faux à la suite de ce suicide. Je compris que l'on m'en rendrait aussitôt responsable alors que je n'y étais pour rien... bien au contraire ! Croyez, docteur, que j'ai tout mis en œuvre pour essayer de deviner ce qui tourmentait Jeanne depuis des semaines... depuis le jour où elle était allé vous trouver ! Mais je n'ai rien pu lui arracher ! J'ai bien senti, pendant ces tout derniers mois, qu'elle était obsédée, torturée par un secret abominable... Elle n'était plus la même... Elle n'était plus cette femme heureuse et souriante à son bonheur... J'ai même eu l'impression, pendant les derniers jours, qu'elle faisait tout pour me détacher d'elle... J'étais désespéré ! Après votre départ, ce matin, docteur, j'étais effondré. Elle s'était tuée ! Pourquoi ? Parce qu'elle ne voulait plus me voir et que sa double vie lui faisait horreur ? Parce qu'elle avait des remords ? Toute la journée je me suis posé l'angoissante question sans trouver la réponse... Celle-ci m'est arrivée tout à l'heure avec cette lettre : Jeanne s'était tuée parce qu'elle savait qu'elle avait un cancer du sein ! Elle se sentait perdue... Maintenant c'est à vous seul de me répondre, d'homme à homme. Oui ou non, ce qu'elle m'a écrit est-il vrai ? — C'est faux ! archifaux ! J'ai examiné en effet Mme Boitard il y a trois mois... Elle n'avait qu'une simple mammite pour laquelle je lui ai prescrit un traitement rationnel. Et comme elle n'est pas revenue me voir depuis, j'ai cru que le remède avait été suffisant. J'ai ici la preuve formelle de ce que je vous dis : la voici... sa dernière fiche de consultation où j'ai noté, avec la date... Regardez-la ! J'estime de mon devoir de vous la communiquer. — Comment alors cette idée monstrueuse a-t-elle pu germer dans son cerveau ? — J'en suis aussi atterré que vous, mon lieutenant. Et j'en arrive à me demander si Mme Boitard n'est pas venue me trouver, il y a trois mois, avec une arrière-pensée... la pensée hideuse du cancer. Il serait arrivé ce qui se produit souvent quand le malade est inquiet : il ne croit plus à personne et il se méfie du médecin qui lui annonce que l'affection est bénigne. Il est persuadé que le médecin, qui dans mon cas était aussi un ami de longue date, veut le rassurer à tout prix. Ajoutez à cela les bruits ridicules que l'on a fait courir sur la mort du père Heurteloup, la «Semaine du Cancer» qui a eu lieu le mois dernier, les affiches que le ministère de la Santé publique fait placarder sur tous les murs, le timbre anti-cancéreux que l'on trouve sur chaque lettre... Tout cela a peut-être gravement ébranlé les pensées de Mme Boitard. Je pense que c'est là qu'il faut chercher la véritable raison de son attitude à votre égard ces derniers temps et aussi de son geste insensé... (A suivre...)