Conflit - Ni l'opposition ni les islamistes au pouvoir ne cèdent du terrain après près d'un mois d'impasse malgré des pourparlers directs et indirects. Une rencontre entre le chef du parti islamiste Ennahda, Rached Ghannouchi, et celui du puissant syndicat UGTT, Houcine Abassi, qui joue le rôle de médiateur dans la crise, s'est achevée en fin de soirée, hier, lundi, sans réelle avancée. «Nous ne sommes pas très optimistes. Il n'y a pas de concessions claires de la part de Ennahda», a jugé Houcine Abassi qui va néanmoins transmettre à l'opposition, ce mardi, les propositions des islamistes. Ghannouchi a pour sa part considéré qu'il y a eu une avancée, qu'il avait fait des propositions sans en préciser la nature. Une autre rencontre entre les deux hommes doit avoir lieu, demain, mercredi. Ce statu quo n'est guère surprenant, les deux camps ayant clairement signifié ne pas vouloir reculer sur leurs revendications respectives, près d'un mois après l'assassinat, le 25 juillet, du député Mohamed Brahmi, attribué à la mouvance jihadiste. Dimanche soir, le parlement interne d'Ennahda a approuvé la position de son chef qui refuse la mise en place d'un gouvernement apolitique réclamé par ses détracteurs et propose un cabinet de coalition élargie. Pourtant dimanche, les islamistes avaient admis avoir participé à de premiers pourparlers directs avec l'un des principaux dirigeants de l'opposition, Beji Caïd Essebsi, chef du parti Nidaa Tounès et ex-Premier ministre post-révolution. Cette rencontre n'a pas permis de percée. Du côté de l'opposition, le Front de salut national (FSN), l'hétéroclite coalition allant du centre-droit à l'extrême gauche qui organise la contestation a aussi réaffirmé son attachement à ses demandes de dissolution du gouvernement et de l'Assemblée nationale Constituante (ANC) et de la formation d'un gouvernement de salut national restreint composé de personnalités indépendantes. Le FSN a aussi renouvelé son appel à l'ensemble des acteurs politiques et sociaux à faire réussir la semaine du «départ» du 24 au 31 août, le calendrier que s'est donné l'opposition pour faire chuter le gouvernement en organisant des grandes manifestations à travers le pays, selon le député Samir Taïeb. Les opposants ont par deux fois, les 6 et 13 août, réuni des dizaines de milliers de manifestants à Tunis, mais leurs manifestations quotidiennes face à l'ANC ne connaissent plus qu'une affluence limitée. Le parti Ettakatol (centre-gauche, allié d'Ennahda) a pour sa part confirmé être pour un gouvernement non-partisan. Il n'a cependant pas annoncé pour autant son retrait du cabinet actuel. Le chef de ce mouvement et président de l'ANC, Mustapha Ben Jaâfar, avait annoncé le 6 août, le gel des travaux de la Constituante jusqu'au début d'un dialogue et il n'a jusqu'à présent pas annoncé de date de reprise des séances. Le gouvernement est accusé d'avoir failli sur le plan sécuritaire face à l'essor de la mouvance jihadiste, mais aussi dans le domaine économique, alors que les revendications sociales étaient au coeur de la révolution de janvier 2011. Un premier gouvernement dirigé par Ennahda avait déjà été poussé à la démission après l'assassinat de l'opposant Chokri Belaïd en février.