Impasse - Opposants et islamistes au pouvoir ont échoué une nouvelle fois hier, vendredi, à se mettre d'accord sur un scénario de sortie de crise. A la veille d'une grande manifestation de l'opposition, le parti islamiste Ennahda avait annoncé une concession avant-hier, jeudi, en admettant la possibilité d'une démission du gouvernement à l'issue de négociations directes. Mais l'opposition a rejeté cette ouverture et maintenu son appel à une mobilisation pour aujourd'hui. «Toute négociation sans dissolution (immédiate) du gouvernement serait une perte de temps», a jugé Taïeb Baccouche, un représentant de l'opposition, après avoir reçu du syndicat UGTT, médiateur dans la crise politique, le détail des concessions d'Ennahda. Jilani Hammami, un autre représentant du Front de salut national (FSN), une coalition d'opposition, a qualifié de «double langage» la proposition des islamistes. Ennahda avait pourtant concédé, pour la première fois, la possibilité d'une démission du gouvernement d'Ali Larayedh à l'issue d'un «dialogue national» dégageant une solution consensuelle à la crise politique. Le parti a cependant souligné que le cabinet resterait en place dans l'intervalle. Le chef du mouvement islamiste, Rached Ghannouchi, a indiqué dans la soirée que les pourparlers allaient se poursuivre «dans les prochains jours». «Nous allons nous consulter au sein de notre parti et avec nos partenaires» de la coalition gouvernementale, a indiqué M. Ghannouchi. M. Abassi a, lui, indiqué qu'il transmettrait «à l'opposition de nouvelles propositions d'Ennahda». Le FSN exige la mise en place d'un cabinet composé exclusivement d'indépendants, avant de négocier sur les autres sujets de désaccords. Les dossiers les plus sensibles concernent la rédaction de la Constitution, en cours depuis octobre 2011 mais en panne depuis des mois, la future loi électorale et le calendrier des scrutins à venir. «Nous allons maintenir la pression pour obtenir la dissolution du gouvernement, nous avons un plan pour augmenter la mobilisation sur le terrain à partir du 24 août», a dit Jilani Hammami. Le premier grand rassemblement est prévu aujourd'hui, à partir de 17h 00 GMT (18h 00 locale) face à l'Assemblée nationale constituante, où depuis près d'un mois, manifestants et députés d'opposition observent un sit-in. La crise politique en cours a été déclenchée le 25 juillet par l'assassinat, attribué à la mouvance jihadiste, du député d'opposition Mohamed Brahmi. Un premier meurtre de ce type en février avait fait chuter le précédent gouvernement dirigé par Ennahda. Plusieurs dirigeants islamistes ont même estimé que les revendications de l'opposition constituaient une tentative «de coup d'Etat» modelée sur le renversement par l'armée égyptienne du président islamiste Mohamed Morsi. Mais la position d'Ennahda est fragilisée par le fait que l'UGTT et le patronat Utica sont favorables à un gouvernement de technocrates. Les deux organisations sont opposées cependant à une dissolution de l'ANC. Le régime en place est accusé d'avoir failli sur le plan sécuritaire face à l'essor de la mouvance jihadiste, mais aussi dans le domaine économique, alors que les revendications sociales étaient au coeur de la révolution de janvier.