Le puissant syndicat tunisien Ugtt a repris sa médiation, hier, entre l'opposition et le parti islamiste Ennahda qui dirige le gouvernement, dans l'espoir de trouver une issue à la crise politique dans laquelle le pays est enlisé. Les représentants de l'Ugtt recevaient hier à la mi-journée ceux du Front de salut national (FSN), une coalition d'opposants allant de l'extrême gauche au centre-droit, a indiqué la centrale syndicale sur sa page Facebook. Dans l'après-midi, le secrétaire général du syndicat, Houcine Abassi et le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, devaient se rencontrer pour leur deuxième réunion de la semaine après qu'une première rencontre lundi n'a donné lieu à aucune percée. Les deux camps ont clairement signifié ne pas vouloir reculer sur leurs revendications respectives, près d'un mois après l'assassinat le 25 juillet du député Mohamed Brahmi, attribué à la mouvance jihadiste et à l'origine de la crise actuelle. Ennahda propose un gouvernement d'union nationale élargi à un maximum de partis, alors que l'opposition réclame encore et toujours un cabinet apolitique de technocrates ainsi que la dissolution de l'Assemblée nationale constituante (ANC). L'Ugtt, qui a adopté une position médiane en militant pour un gouvernement apolitique et le maintien de l'ANC, s'est retrouvé à contrecoeur dans le rôle du médiateur après que le président de la Constituante a gelé les travaux de l'Assemblée le 6 août en demandant au syndicat d'amener les islamistes et les opposants vers un compromis. Le FSN a pour sa part prévu une «semaine du départ» à compter de samedi pour arracher, via des manifestations, le départ du gouvernement actuel. Le gouvernement est accusé d'avoir failli sur le plan sécuritaire face à l'essor de la mouvance jihadiste, mais aussi dans le domaine économique, alors que les revendications sociales étaient au coeur de la révolution de janvier 2011.Un premier cabinet dirigé par Ennahda avait déjà été poussé à la démission après l'assassinat de l'opposant Chokri Belaïd en février. Parallèlement, le Premier ministre tunisien Ali Larayedh a prévenu mardi soir qu'il ne tolèrerait aucune «atteinte» à l'Etat alors que l'opposition prépare une semaine de protestation pour pousser le gouvernement dirigé par les islamistes à la démission, selon l'agence officielle TAP. «Ali Larayedh a dit qu'il n'y aura aucune hésitation ou recul face à ceux qui, par le terrorisme, l'anarchie ou la révolte, porteront atteinte aux institutions de l'Etat», a rapporté l'agence, précisant que le Premier ministre répondait à une question sur les manifestations que prépare l'opposition. Cette dernière a prévu de multiplier les manifestations à Tunis et en province à compter du 24 août pour arracher le départ de l'équipe au pouvoir, une action baptisée «semaine de la colère». L'une des figures de l'hétéroclite coalition d'opposants, Hamma Hammami, a souligné mardi lors d'une conférence de presse que ce mouvement sera pacifique. «Nous n'avons appelé ni à la violence ni à l'effraction (dans des bâtiments publics), juste à des sit-in pacifiques afin de faire partir la coalition au pouvoir et les responsables désignés sur des bases partisanes et non de compétence», a-t-il souligné. «Le Front de salut national (la coalition d'opposition, ndlr) va poursuivre la campagne et s'il y a des violences ce sera de la part» des autorités, a-t-il ajouté.