Garidi «C?est toi que je préfère», a-t-il avoué à Nadjia, qui émergea en tremblant de sa somnolence. «Comment peux-tu, fils, avoir des yeux d?homme pour une femme aussi vieille que moi ? C?est de la folie, reprends tes esprits !» Nabila est toute contente de présenter Karim, l?homme de sa vie, à sa mère Nadjia. Cette dernière s?est bien préparée pour recevoir son futur gendre : hammam, coupe chez la coiffeuse, belle robe, maquillage discret. Nadjia a dépassé la quarantaine mais, avec un peu de bonne volonté, elle séduit encore. Dommage qu?elle n?ait pas de chance, disent les gens bien intentionnés. Son mari Abdelkader, Dieu lui pardonne, s?est laissé prendre dans les filets d?une autre femme, de m?urs légères, dit-on. Maintenant, il l?a épousée et a menacé sa première épouse en des termes clairs et nets : «Si tu veux rester mariée, tu as intérêt à avoir une attitude exemplaire et t?occuper de tes filles. Si je téléphone et que je ne te trouve pas, je te répudierai.» Etre là, tout le temps, à proximité de l?appareil dont dépendent sa vie et l?avenir de ses filles, voilà l?obsession de Nadjia. A la longue on s?impatiente, on perd les pédales, on se révolte et adieu la sécurité ! Mais voilà, Nadjia est une rêveuse, une romantique qui, pour tromper le temps, s?est plongée corps et âme dans la lecture de romans d?amour de la collection Arlequin, une heureuse parenthèse pour oublier, un baume merveilleux pour les blessures, des rêves à l?infini... Karim est tout de suite tombé sous le charme. En effet, il a rapidement constaté la différence entre la mère et la fille. C?est un rêveur, traînant derrière lui une enfance malheureuse parce que sa mère est morte trop tôt. Il ne comprend pas comment un homme normal a pu abandonner une telle femme ! Nabila, en revanche, est réaliste, froide et calculatrice. «C?est toi que je préfère», a-t-il avoué à Nadjia. Celle-ci émergea en tremblant de sa somnolence. «Comment peux-tu, fils, avoir des yeux d?homme pour une femme aussi vieille que moi ? C?est de la folie. Reprends tes esprits.» Mais la douceur de la voix ne fit que bercer un peu plus Karim, le troubler davantage. Il accepta d?épouser la fille, rien que pour se rapprocher de la mère. Dès le début, Nabila savait. Mais que faire ? Elle en voulait à sa mère de cette séduction qui émanait d?elle comme une malédiction. Un jour, le téléphone sonne et Nabila, jalouse, se venge et raconte à son père que sa mère voulait lui voler son mari. Abdelkader, comme fou, s?arme d?un couteau et se rend chez son épouse. Il lui assène de toutes ses forces plusieurs coups de couteau qui atteignent la malheureuse en divers endroits du corps. Le sang gicle de partout. Abdelkader, ne change rien à sa déclaration devant le juge d?instruction. A la fin du mois de mai 2004, il est jugé par le tribunal criminel d?Alger. Lors de son procès, il ne cherche nullement à amadouer le jury et avoue ne pas regretter son geste. Abdelkader, selon le représentant du ministère public, ne peut bénéficier d?aucune circonstance atténuante. La peine capitale est requise contre le meurtrier. Après les délibérations d?usage, le jury condamne Abdelkader à 20 ans de réclusion criminelle. Nabila, qui croyait qu?en se débarrassant de sa «rivale» elle allait récupérer son mari, réalise que ses calculs étaient totalement faux car non seulement elle a perdu son mari, mais aussi sa mère !