Interrogation n «Comment se fait-il qu'un pays qui a construit 4 millions d'unités, selon l'ex-ministre de l'Habitat, n'arrive même pas à réaliser, après une si riche expérience, un million de logements ?» Le président du Collège national des experts architectes, M. Boudaoud a cité l'ex-ministre de l'Urbanisme et de l'Habitat, Nadir Hmimid, qui avait déclaré que l'Algérie avait réalisé, depuis l'Indépendance, 4 millions de logements. Et de s'interroger : «Comment se fait-il qu'un pays qui a construit autant d'unités, n'arrive pas à réaliser, après une si riche expérience, un million de logements ?» Adepte des chiffres, M. Boudaoud en use à satiété. «Il existe, dans notre pays, 890 centres de formation professionnelle, chaque centre a la capacité de former 1 000 techniciens. Multiplions ce chiffre par le nombre d'établissements, nous aurons 890 000 techniciens.» Et d'ajouter : «Divisons ce chiffre par le nombre de communes qui est de 1 541, nous obtenons donc le ratio de 577 techniciens par APC.» Il va sans dire que pour le président du Collège, l'Algérie est suffisamment outillée pour former la main-d'œuvre qui lui fait tant défaut. «Mais a-t-on essayé de professionnaliser et de mettre à niveau l'entreprise algérienne en l'obligeant à se doter d'une direction technique et de recruter des gens ayant obtenu des diplômes ?», s'est-il interrogé. Ainsi, d'un revers de la main, il balaie l'affirmation selon laquelle il y aurait une pénurie de main-d'œuvre en Algérie. «Les gens ne connaissent pas ce marché», dit-il. Pointant un doigt accusateur vers les entreprises, il pose cette question : «Les a-t-on vues se réunir pour décider d'une stratégie, les a-t-on vues se présenter au niveau des écoles ? En France, il y a 42 architectes pour 100 000 habitants, en Algérie il y en a 22 pour 100 000 habitants, nous sommes, donc, dans les normes internationales, pour peu qu'il y ait une bonne organisation. Nous sommes en mesure de relever le défi.» M. Boudaoud insiste sur le fait qu'il n'y a pas de stratégie. Il suggère, aux entreprises, de se faire connaître par catégorie ou spécialisation. «Elles peuvent, par exemple, se répartir entre entreprises gros œuvres et entreprises tous corps secondaires. Sachant qu'il existe 26 000 entreprises en Algérie, si nous confiions à chacune d'elles la réalisation de 100 logements/an, nous aurions 2 600 000 logements/an. Faites le calcul pour 4 ans et vous aurez un peu plus de 10 millions de logements.» Cela dit, Mouloud Kheloufi, président de l'Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA), pose le problème autrement. Pour lui, la pénurie locale en main-d'œuvre est la conséquence de la situation imposée à l'entreprise algérienne. Il incrimine, en premier lieu, le code des marchés publics, qui, selon lui, outre qu'il privilégie les entreprises étrangères, constitue «un blocage pour l'entreprise algérienne.» Aussi, plaide-t-il pour la révision dudit code aux fins de rétablir l'entreprise locale dans ses droits. «Le code devrait obliger les sociétés étrangères à sous-traiter avec les entreprises locales afin d'établir un partenariat qui ramènerait un savoir-faire, à charge pour nous de fournir la main-d'œuvre et l'équipement. La formation professionnelle doit évidemment suivre», a-t-il argumenté. L'Etat a fixé la soumission entre 500 et 1 000 logements, ce qui, d'après lui, excède les capacités de réalisation de l'entreprise algérienne. R. K.