Distinction - La troupe El Chamail de la wilaya de Tindouf a obtenu le premier prix du concours de l'inchad, organisé à la maison de la culture Moufdi-Zakaria par la direction de la culture de la wilaya. El Chamail a su s'imposer – parmi les 9 troupes concurrentes – par ses capacités artistiques de haut niveau sur le podium de la 4e édition du festival de l'inchad. En décrochant la première place elle participera ainsi au festival international de l'Inchad prévu à Constantine du 31 septembre au 6 octobre prochain. La troupe El-Houda de la wilaya d'Adrar, a, quant à elle, décroché la seconde place. La 3e place est revenue à la troupe Nassaim El-Rouh de Ghardaïa. «Ces prix ont été soigneusement et sérieusement décernés à ces troupes par un jury de professionnels dont Abderrahmane Guemat, Madani Amar Ismaïl Yelles, Rabah Drif et le mounchid Abderrahmane Bouhbila», a souligné le commissaire du festival, Mokhtar Guermida (directeur de la culture de Ouargla). Au terme de la 4e édition du festival, les membres du jury ont recommandé la création de bulletin spécial de l'inchad. Ce dernier permettra aux troupes de jeunes spécialisés dans ce mode de chant, de se former et de trouver toutes les données académiques sur les principes de base de ce type de chant. Les troupes, elles, devraient, à leur tour, faire un grand travail à l'avenir quant aux textes à interpréter et au choix de la musique. Enfin, les troupes du Grand Sud notamment celles de l'extrême Sud appellent les responsables de la culture à les aider, notamment dans leurs déplacements. «Nous avons honoré notre région. C'est très louable de la part de la direction de la culture de Ouargla qui nous a envoyé des bus pour nous conduire de nos wilayas vers Ouargla. Mais le trajet a été très long et très fatigant. Ce qui a eu un effet négatif sur nos performances. Je voudrais demander au ministère de la Culture de nous permettre de nous déplacer par avion pour diminuer les longues distances», demande Touiti Mohamed Sid Ali, le représentant de la troupe El Mawahib Tidikelt In Salah (Tamanrasset). Un autre jeune a souhaité profiter des conseils et orientations de tous les membres de jury. «Nous ne sommes pas encadrés chez nous. Nous aurions souhaité bénéficier de plus d'ateliers de formation pour l'apprentissage des bases de l'inchad. Les 2 ateliers sont courts et insuffisants.» A signaler que 30 millions de centimes seront octroyés au premier prix, au deuxième 20 millions et au troisième 15 millions. A noter enfin que le festival bien que dédié à l'inchad uniquement, a dévoilé des talents signés par des jeunes ayant réussi à traduire des textes suivant les rythmes de leurs régions dont les Soufis (El-Oued), les Mozabites (Ghardaïa), les Touareg (Tamanrasset, Adrar et Tindouf). Le don ne suffit pas L'enseignant et mounchid Ismaïl Yelles de M'sila, membre du jury a fait bénéficier les troupes participantes de son expérience qu'il qualifie de «modeste». Avec sa capacité de convaincre et d'attirer le public, il a pu faire vivre aux jeunes des moments de formation tant attendus au niveau de leurs localités. Ismaïl Yelles se dit réconforté de voir que le cercle de l'inchad commence à prendre une dimension de plus en plus importante. «Auparavant le public de ce style de chant était limité. Mais aujourd'hui grâce aux chaînes satellitaires, ce public est devenu de plus en plus large au point de voir des festivals dédiés à ce type de chant», a-t-il souligné et d'ajouter : «L'inchad traite aujourd'hui des sujets d'actualité et des phénomènes de société. Le travail des ateliers est basé sur des données académiques et scientifiques afin d'encadrer nos jeunes mounchids. Le don dans l'inchad ne suffit pas. Il requiert d'autres critères dont la voix, le vocalisme pour les capacités vocales, la parole et la forte croyance en l'inchad lui-même.» Au sujet du niveau de l'Inchad, le spécialiste estime qu'il reste moyen et un grand travail doit être fait pour passer à la phase de la participation internationale. Pour sa part, le mounchid algérien de la chaîne El Charika, Abderrahmane Bouhbila, estime que beaucoup reste à faire dans le domaine de l'inchad. Il s'est dit prêt à aider des jeunes comme lui à améliorer leurs performances. Le poète et journaliste de la radio de M'sila Rabah Drif, note, se basant sur son parcours comme membre de jury dans des festivals comme celui de Guelma pendant 3 éditions et celui de Ouargla, que les jeunes confondent et prennent des poèmes pour en faire de l'Inchad. «Je vois que ceci constitue un danger pour l'art de l'inchad qui devrait être un art à part entière et un art concurrent chez nous.» Mais il s'est dit soulagé de noter l'amélioration du niveau des troupes. «Nous devons exporter cet art afin de montrer notre culture.» Un style Hassani et Tindi Le président de l'association El Chamail du madih et el inchad de Tindouf, Amarate Ahmed, se félicite des performances de sa troupe. «C'est un honneur pour nous de pouvoir décrocher le premier prix. Nous espérons réaliser de meilleurs résultats lors du festival international de Constantine. Nous allons bien représenter notre pays.» Relevant de la ligue scientifique des activités de jeunes de Tindouf, l'association El Chamail a été créée en 2009 et active à la maison de jeunes Mestari-Redouane de la ville. Elle participe dans des festivités locales et nationales et au niveau des mosquées avec son propre cachet authentique traditionnel et local. «Notre secret est le style ''Maqam el Khoumassi''», nous dit le président de l'association. Ce dernier n'a pas omis de citer l'association El Istibar relevant de l'association Malek-Benabi de Tindouf. «Cette association nous a soutenus et encouragés pendant longtemps même avec des textes», a-t-il repris, évoquant les contraintes de travail de son association en l'absence d'un local et de soutien financier, sachant que la dite association assure en parallèle des cours de soutien au profit des élèves dont les langues étrangères. Abdelkader Haddi, l'un des membres d'El Chamail, s'est distingué avec sa voix aiguë en chantant en mode El Hassani et Tindi. Ce qui a distingué aussi toute la troupe lui permettant de décrocher un prix de mérite ayant répondu aux critères du jury professionnel. Outre les madihs du prophète (Qlsssl), l'association El Chamail pour rappel, traite plusieurs thèmes de société. «Nous avons un public passionné de madih et d'Inchad. Nous souhaitons arriver à produire un album afin de diffuser à une large échelle notre produit. Mais pour cela il faut les moyens», reprend le mounchid Abdelkader Hadi. Parole au jury Le président du jury Abderrahmane Guemat, poète et compositeur, veut que les chanteurs d'inchad se débarrassent du complexe du recours aux textes locaux algériens. «Nos jeunes mounchids devraient acquérir des bases solides car ils ont des messages nobles à faire passer», a-t-il souligné en marge du festival. Cet enseignant qui a représenté le pays à dans plusieurs pays étrangers (Belgique, Corée, France et pays arabes),estime que l'inchad reste médiocre chez nous. Ayant un répertoire de plus de 1 500 textes de musique ainsi que le projet d'un livre, le professeur Guemat veut donner ses produits «mais à des gens qui méritent et valorisent ses travaux». Le professeur de musique à Djamaa (El-Oued) Madani Ammar a exposé les critères de sélection des meilleures troupes dont entre autres le choix du texte en premier lieu l'habit (traditionnel, local).Notre interlocuteur note d'après ses larges participations aux festivals de ce genre que les troupes ne respectent généralement pas les critères. «C'est rare de retrouver des troupes vêtues de leurs habits traditionnels. En outre, les textes sont de pures reproductions de textes étrangers alors que notre pays compte un nombre important de poètes et de textes algériens. Je ne vois pas pourquoi certaines troupes ont ce complexe pour tout ce qui est local. Les jeunes ont un manque de formation et ne savent pas ce qu'ils ont comme richesses chez eux.» Avant de conclure, Madani Ammar a émis le vœu d'arriver à l'élaboration d'un guide du mounchid que le ministère de la Culture pourra encourager. «Il devra encourager le madih traditionnel et même le contemporain. Le guide devrait être encadré par des spécialistes. Il sera basé sur l'identité nationale et les principes de la religion et de la tradition.» Pour rappel, ce guide de l'inchad est revendiqué par tous les membres du jury du festival de l'inchad pour de meilleures orientations de jeunes mounchids. Passé d'un mode lié uniquement à la parole et à la religion et l'instrument prohibé, l'inchad est passé actuellement à la sensibilisation sur des sujets d'actualité avec le recours aux instruments de musique dont le synthétiseur avec plusieurs langues.