Problématique - Les lois pour lutter contre la violence contre les femmes existent. Mais les appliquer dans leur totalité pose problème. On parle notamment des peines accessoires composant la loi 264 du code pénal. En vertu de ce texte le juge peut, outre la peine délictuelle, interdire au condamné de jouir de ses droits civiques pour une durée de cinq ans. Si cet alinéa venait à être appliqué, le coupable serait destitué de toute fonction supérieure dans un parti politique ou dans une institution étatique. Il serait également privé de son droit à être électeur ou éligible et de porter une décoration. Il lui serait aussi interdit d'être, entre autres, un juré, un expert, un témoin, diriger une école ou être tuteur. Une législation conséquente qui devrait permettre au juge d'agir dès lors que la victime présente un certificat médical ou des témoins. Ce n'est malheureusement pas le cas. Cette disposition est restée curieusement lettre morte depuis l'instauration de cette loi en 1982. «Pour mettre un terme à cette violence, il faut appliquer la loi dans sa totalité. Or aucun juge n'a osé prononcer ces peines accessoires», déplore maître Ben braham qui intervenait, hier dimanche, à la faculté d'Alger. Elle avoue ignorer ce qui «bloque entre la loi et le juge». «Les parquetiers ne demandent jamais ces peines d'où l'importance de libérer les procureurs et les juges», plaide-t-elle. Aujourd'hui, la plus part des accusés dans ces affaires de violence à l'égard des femmes, écopent de deux mois de prison ferme assortis d'une amende allant de 500 da à 10 000 da. Dans le cas où cette violence a entraîné la mort, le coupable est condamné à la perpétuité. La journée international de la lutte contre la violence faite aux femmes, célébrée comme chaque année le 25 novembre, était aussi une occasion pour l'intervenante de rappeler quelques chiffres avant de les contester. Les statistiques des services de police évoquent une augmentation annuelle d'environ mille cas. Elles étaient l'année dernière 8 500 victimes contre 6 000 en 2011. 216 d'entre elles ont perdu la vie en 2012. Le ministère de la Justice parle pour sa part de 7 000 affaires portées devant les tribunaux. Un bilan qui reste bien en deçà de la réalité sur le terrain, selon Ben Braham. «Ce sont des milliers sinon des millions de femmes qui sont violentées dans notre pays. Si on tient compte des affaires traitées par les avocats, le chiffre avancé par le ministère de la justice peut passer à 70 000», assure l'avocate qui persiste et signe que 70 % de femmes en Algérie ont subi une violence au cœur de leur vie, soit une sur trois. Dans ce décompte, maître Ben Braham inclue plusieurs formes de violence, en l'occurrence la servilité dont dit-elle «on ne parle presque jamais. Pourtant elle est très présente dans notre société». Terrorisées, méprisées, injuriées, beaucoup d'entre elles ont choisi de souffrir en silence refusant de déposer plainte, voire d'en parler. «Certaines refusent même de reconnaître leurs agresseurs devant le juge, changeant de déposition à la dernière minute, par peur de la société et parce qu'elles veulent toutes être des «filles de famille».