Le jeu avec le couteau coûte cher, son port seul vaut une année ferme. L´inculpé du jour a frappé deux fois: au thorax et au cou... Le jeu de couteau aura valu à Oussama, trente jours d´incapacité. Le détenu a joué avec la tentative de meurtre. Il a frisé la crim: Selma Bedri, la présidente de la section correctionnelle détenus du tribunal d´El Harrach (cour d´Alger), veille. Les faits s´étaient déroulés vers zéro heure dans le quartier populeux. Il y avait des témoins pour affirmer que l´inculpé était seul contre une bande. «Une semaine auparavant, il était ivre mort devant notre domicile où il n´y a là que le rez-de- chaussée. Avec lui, se trouvaient quatre de ses copains. C´est ce qui a fait que la victime avait cru être Antar volant au secours de Abla». Maître Mehdi Djebbari l´avocat d´un cambrioleur qui attendait son tour pour défendre la cause, acquiésait. Reprenant la gestuelle des deux coups de couteau portés sur l´omoplate droite, la magistrate a mis l´accent sur les coups volontaires: «Vous l´avez échappé belle!», a tonné Bedri qui a dit son dégoût du port et de l´usage d´une arme blanche: «Vous avez des poings, non? Vous n´avez qu´à vous battre à mains nues!» Faïza Mousrati, la représentante du ministère public, exhibe le casier judiciaire de l´inculpé qui ne savait pas que son passé récent était sous les yeux de la justice, une justice au bras si long que nul ne peut échapper à ses injonctions.... L´unique témoin effectue son devoir. Il raconte les faits. Et son témoignage est une bouée de sauvetage pour le détenu. «Ils étaient cinq et lui, seul. Je pense qu´il a sorti le couteau pour se défendre. Voilà ce que j´ai vu», a ruminé le témoin qui n´a, à aucun moment cligné des yeux. N´ayant pas avalé l´allusion du jeune avocat à propos de la légitime défense, la présidente avait toussoté d´abord, tapé le pupitre avec la pointe de son stylo et fait semblant de ne pas avoir entendu les trois mots: «La légitime défense», et préfère rappeler au détenu qu´il est sous le coup de l´article 264 du Code pénal: loi n°06-23 du 20 décembre 2006 qui évoque les «violences volontaires, et qui dispose que: Quiconque, volontairement, fait des blessures ou porte des coups à autrui ou commet toute autre violence ou voie de fait, et s´il résulte de ces sortes de violence une maladie ou une incapacité totale de travail pendant plus de quinze jours est puni d´un emprisonnement de un (1) à cinq (5) ans et d´une amende de cent mille à cinq cent mille dinars. Le coupable, peut en outre, être privé des droits mentionnés à l´article "14" de la présente loi pendant un an au moins et cinq ans au plus. Quand les violences ci-dessus exprimées ont été suivies de mutilation ou privation de l´usage d´un membre, cécité perte d´un oeil ou autres infirmités permanentes, le coupable est puni de la réclusion à temps de cinq à dix ans. Si les coups portés ou les blessures faites volontairement, mais sans intention de donner la mort l´ont pourtant occasionnée, le coupable est puni de la peine de la réclusion à temps de dix à vingt ans.» Il est vrai que dans ce dossier, il y a deux victimes et deux certificats médicaux: le premier de trois jours de cessation de travail et le second, trente, avec deux coups de couteau: le premier, sur le thorax et le second, sur le cou. D´ailleurs, à plusieurs reprises la présidente avait crié sa douleur: «Oui, vous auriez pu comparaître au Ruisseau en criminelle. Alors ne venez pas me parler de hogra!» Et ce sera dans le sillage de la réflexion que Bedri, la juge passe outre, les demandes de Faïza Mousrati la procureure, qui avait réclamé trois ans pour infliger à l´inculpé, déclaré coupable, une peine de quatre ans ferme. De quoi calmer les ardeurs de ce jeune qu´une ire avait envoyé aux «Quatre Ha» Désirant répliquer à l´avocat, la représentante du ministère public avait pris deux minutes: «Trois ans de prison ferme», murmure, sans état d´âme, la procureure; signalons qu´elle n´a eu de cesse de poser de grosses questions gênantes pour l´inculpé qui était ainsi entre deux mâchoires...Il est vrai que c´est grâce à une saine instruction que le détenu avait pu échapper à la criminelle, a ajouté la parquetière. Durant les débats, l´inculpé a encore une énième fois mis en avant la légitime défense. Ce dernier concept ne signifiant pas toujours la même chose pour le tribunal ou la défense. Surtout pour Mousrati, la procureure, il ne peut y avoir de légitime défense, rejoignant ainsi, la juge qui était restée accrochée aux trente jours d´incapacité de la victime. «Ici, dans cette affaire, il n´y a aucune raison de retenir la légitime défense», conclut la procureure d´El Harrach...