Expérience ■ Après plus d'une décennie de journalisme, Amel Blidi a été tentée par l'aventure cinématographique, en l'occurrence par la réalisation du court-métrage Demain sera un autre jour. S'exprimant sur la raison l'ayant motivée à aller vers la réalisation du film documentaire, Amel Blidi raconte : «L'idée était d'explorer de nouveaux moyens d'expression. Certes, le journalisme offre cette possibilité mais cela reste très limité. Le cinéma est un art complet qui permet de conjuguer le texte, le son et l'image. Le problème réside dans le fait qu'il n'existe pas de véritable école de cinéma en Algérie. Nous n'aurons sans doute jamais pu caresser le rêve de faire un film sans l'appui de l'association Cinéma et mémoire et de son atelier de création de films documentaires Béjaïa Doc. Je tiens à remercier toute l'équipe de l'association pour ce qu'elle nous a apporté. Ce fut une très belle aventure humaine dont nous sortons grandis. Je ne ferai certainement plus mon métier de journaliste de la même manière.» Quant à savoir comment elle a perçu ce changement tout au long de la réalisation du film, elle dit : «Pour cette première expérience filmique, nous avons été poussés à parler de nous-mêmes à travers des films intimistes. Le fait est que nous ne pouvons aspirer à faire du cinéma documentaire sans nous mettre en danger. Il fallait que nous nous mettions, nous aussi, devant la caméra pour en comprendre les difficultés. Pour cela, il est essentiel d'approfondir notre point de vue sur les questions abordées par le film. Dans nos articles, nous nous cachons souvent derrière des témoins, experts ou intervenants pour dire des choses. Si le journaliste a besoin de se conformer à une objectivité – réelle ou supposée –, le réalisateur peut faire preuve d'une subjectivité assumée. Le film documentaire porte notre regard sur la société dans laquelle nous vivons. Le travail sur ce film, qui fut de longue haleine, nous a aidés à nous questionner, à approfondir notre point de vue sur certaines questions qui nous concernent directement. Car c'est aussi un travail sur nous-mêmes qui aide à nous regarder en face. En braquant la caméra sur notre quotidien, elle nous renvoie une image qui n'est guère plaisante. En Algérie, nous avons beaucoup de mal à parler de nous. C'est pourtant un travail douloureux mais nécessaire.» Notons que le mari de Amel Blidi, à savoir Nabil Boubekeur, s'est joint à l'équipe de stagiaires dans cette formation et pour la concrétisation du film. Interrogée sur cette expérience, Amel Blidi répond : «C'est là aussi une expérience difficile car nous avions deux visions différentes. Certes, nous sommes un couple, mais chacun a une sensibilité, un regard, un point de vue. Il a fallu faire des concessions. Je suis contente que le film aboutisse malgré toutes les difficultés car il est destiné avant tout à notre fils.» Mais elle tient à préciser que cela a été une belle expérience partagée, voire «une très belle aventure humaine dont nous sortons grandis...» Demain sera un autre jour raconte l'histoire d'un jeune couple confronté à l'éducation de son premier enfant. Sans chercher à apporter de réponses, les deux réalisateurs, qui mettent en scène leur propre histoire, livrent dans une balade poétique et artistique leurs espoirs, leurs craintes et leurs idéaux face aux réalités du pays. Dans ce film documentaire, il est question, sur le plan thématique, de racines et de retour sur la mémoire ancienne. A ce propos, Amel Blidi dit : «Nous avons traité, dans ce film, la question de la transmission. Un thème qui s'est imposé de lui-même. Chaque parent, partout dans le monde, s'est posé la question de savoir ce qu'il va léguer à son enfant. Pour cela, nous avons voulu interroger l'histoire de nos ancêtres pour essayer de nous construire et défier ainsi la peur des lendemains incertains. Le film prend ainsi la forme d'un road-movie, d'une quête de notre propre identité. C'est un peu comme si nous regardions dans le rétroviseur tout en poursuivant notre chemin car il nous faut aller de l'avant. Nous interrogeons ainsi notre place en Algérie, dans la société actuelle et, par là même, l'Histoire de notre pays.» Enfin à la question de savoir si elle veut bien continuer dans cette voie et quels sont ses projets en la matière, Amel Blidi répond : «Evidemment, nous avons maintenant pris goût à la réalisation. Nous aimerions, bien sûr, continuer dans cette voie. Les idées, la volonté et le besoin d'exprimer des choses sont là, il reste à savoir si les moyens suivront...»