Dans les langues algériennes la maison et le foyer se confondent ; ddar, dit-on en arabe dialectal, akhkham ou taddart en berbère. En effet, la maison ce n'est pas seulement la construction, la bâtisse où, pour employer un mot plus prosaïque, le gîte où l?on cherche refuge : c?est aussi le lieu où on vit avec sa famille et, par extension, la famille elle-même ! C?est si vrai que l?un des mots employés pour désigner la famille est ddar : Makach ddar signifie «la famille, les parents ne sont pas là», Nchawar eddar signifie : «Je vais consulter ma famille.» On ajoute parfois sh?ab eddar (en berbère: at wekhkham) «les gens de la maison», mais ddar et akhkham ne se suffisent pas à eux-mêmes ! Dans la société traditionnelle, on employait aussi ddar pour désigner par euphémisme l'épouse. C'est l'équivalent de la'âyel, qui signifie au propre «famille». Un joli proverbe kabyle fait de la femme le pilier central de la maison ! La femme est ici privilégiée, mais tous les membres de la famille ont des droits sur la maison où ils vivent et l?un des plus grands malheurs est d'être chassé de sa demeure par un intrus : «Fâr lekhla yetrad fâr lbeyt», «la souris des champs chasse la souris domestique !» La maison est considérée comme un être vivant dont il faut s?occuper. D?ailleurs, selon une croyance répandue dans toute l'Algérie, chaque maison a un gardien invisible, a'âssas ddar, a?âssas n wekhkham, gardien invisible qu'il ne faut pas offenser par des cris ou des propos désagréables. C'est par égard pour ce gardien qu'il est de tradition d?aimer sa maison et de ne jamais la déconsidérer, aussi modeste soit-elle : ddar-i tastar 'ari, dit le proverbe, «ma maison cache mes défauts». On recommande aussi de respecter les maisons où on est reçu ou alors où on habite à titre temporaire : «Comment te trahir ô maison où nous mangeons et où nous nous habillons ?», dit le proverbe kabyle.