On appelle mahbul celui qui perd la raison. Le mahbul, c'est le fou, l'aliéné, le forcené... On emploie aussi, pour cela, des expressions imagées : «Rah' 'aqlu» (son esprit est parti), «tferfer 'aqlu» (son esprit a pris son envoI), etc. D'une perte de raison momentanée, on dit tferfech, du verbe ferfech qui signifie «farfouiller, bredouiller», la perte de la raison se manifestant par une tendance à l?embrouillement. Une expression plus forte est «kla kwaghtu» (il a avalé ses papiers), sous-entendu ses papiers d'identité : le fou est celui qui n'a plus d'identité, qui ne peut donc être tenu pour responsable de ses actes. Un autre terme, mtokki, vient, lui, du français «toqué». Les jeunes emploient un terme curieux : mtepres ; c'est sans doute également un emprunt au français «dépression», transformé en verbe grâce au préfixe «m» formateur de verbes en arabe dialectal : mdepresse, qui a une dépression, ou alors qui est devenu fou à la suite d'une dépression. Signalons que la langue algérienne a déjà emprunté mdiprimé (déprimé), utilisé, lui, dans le sens qu'il a dans la langue d'origine. Des personnes âgées emploient aussi des expressions d'autrefois. Ainsi, «issal fi ddar nkhel» (il a des droits sur la maison des palmiers), la maison des palmiers étant un hôpital d'Alger où l?on enfermait les fous. On disait aussi, à Alger, «issal fi lam?sala» (il a des droits sur la M?sala), Ms'ala étant le nom ancien de l'actuelle place du 1er-Mai ; le mot signifie «lieu de prière», la place étant autrefois un lieu où, pour la fête de l'Aïd, on faisait la prière. C'est faire preuve d?inconscience que de revendiquer comme sien un lieu public !