Evocation ■ Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf étaient des hommes simples, très modestes. «Echo de plume», un rendez-vous hebdomadaire, dédié à l'art des planches, a évoqué, hier, au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi, à travers l'intervention de spécialistes du théâtre algérien, deux noms, deux grandes figures emblématiques de la pratique théâtrale algérienne, à savoir les regrettés Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf. Deux hommes aux parcours croisés. Tous deux se sont rencontrés, connus, côtoyés et ont vécu ensemble, mais chacun à sa manière, selon son expérience personnelle, l'existence théâtrale. Ils ont évolué sur les planches du théâtre national algérien (TNA). Deux hommes, deux «monstres» du théâtre algérien aux parcours donc croisés, si ce n'est identique, puisqu'ils ont choisi et suivi la voie du théâtre, une passion vécue pleinement, et qui les a conduits jusqu'au faîte de leur carrière. Les intervenants – Abdelhamid Rabia (spécialiste des biographies des hommes et femmes de théâtre et de l'histoire du théâtre algérien en général), Hassan Tlilani (universitaire et critique d'art dramatique) et Brahim Noual (critique d'art dramatique) – ont souligné le charisme de Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf. Ils étaient unanimes sur la façon dont l'un et l'autre concevaient l'approche théâtrale. Une approche basée sur leurs expériences individuelles respectives. Tous deux étaient poussés par ce besoin de renouveler, voire rénover, le champ théâtral. Et leur expérience les a donc conduits à le faire. Ce renouveau ne pouvait se faire, estimaient Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf, sans l'apport des nouvelles générations. C'est pour cela qu'ils s'ouvraient sans protocole ni prétention aux jeunes et leur offraient cette possibilité d'aller de l'avant, jusqu'au bout de leur rêve. «Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf étaient des hommes simples, très modestes. Ils aimaient partager leur expérience avec les jeunes. Ils étaient de ces hommes à la forte personnalité et au caractère intransigeant. Pour eux, il était indispensable d'ouvrir la voie aux jeunes compétences et aux énergies créatrices, alors que d'autres fermaient les portes aux jeunes», ont déclaré les intervenants. Et d'ajouter : «Azeddine Medjoubi et M'hamed Benguettaf étaient attachés à leur pays, à leur culture. L'algérianité s'exprimait sur les planches à travers leur langage, leur style et leur mode de pensée. Leur jeu était authentique, véridique, crédible et attachant...» S'attardant sur M'hamed Benguettaf, Hassan Tlilani a dit : «Les pièces de M'hamed Benguettaf ont enregistré un franc succès. En plus, chacune de ses adaptations constituait une création en soi. Il ne se contentait pas de reprendre un texte et de le reproduire sur scène – en tant que metteur en scène – mais il avait le souci de le réécrire, de l'adapter à la réalité algérienne, donc de le récréer.» Hassan Tlilani a, en outre, mis l'accent sur le rôle de M'hamed Benguettaf en tant que gestionnaire, administrateur du Théâtre national algérien (de 2003 jusqu'à sa disparition). «Même en tant qu'administrateur, M'hamed Benguettaf a créé dans la façon de gérer l'institution théâtrale. Il a rassemblé les créateurs, il leur a ouvert les portes du TNA». En son temps, l'activité théâtrale a effectivement connu un dynamisme sans précédent à travers divers rendez-vous et initiatives, dont le Festival national du théâtre professionnel qu'il avait relancé, alors que d'autres avaient échoué à le faire. Cette rencontre coïncidait avec l'anniversaire de l'assassinat de Azeddine Medjoubi, le 13 février 1995, et avec le quarantième jour (13 février dernier) de la disparition de M'hamed Benguettaf, le 5 janvier 2014.