Résurrection La Casbah de Béjaïa, monumentale forteresse datant de l'époque almohade au XIIe siècle, a retrouvé, ces derniers mois, des couleurs après avoir été livrée au purgatoire des années, voire des siècles durant. La restauration de la mosquée Ibn Khaldoun s'y trouvant, sauvée in extremis de la ruine, et l'installation en son sein de l'annexe de la Bibliothèque nationale ont relooké l'apparence générale des lieux. D'autres bâtiments, à l'instar du château espagnol ou de la maison à patio, sont toujours le siège d'une usure et d'une dégradation avancées. Unique parade pour éviter «l'effet de la brioche», la réhabilitation générale de la citadelle reste un vestige unique témoignant encore des multiples bouleversements civilisationnels qu'ont connus la région de Béjaïa et ses environs depuis des lustres. Situé au c?ur de la ville, l'endroit concentre, à lui seul, l'essentiel de la mémoire collective de la région, même si, faute de fouilles et de recherches pointues, ses repères historiques ne sont pas encore établis avec exactitude. Selon M. Righi, archéologue, ses fondements remontent, a priori, à l'époque romaine, bien que aucun vestige ni texte historique n'aient été découverts à ce jour. Le seul indice relevant ce fait reste la découverte d'un texte épigraphique qui remonte au temps de la Maurétanie césarienne, 40 ans après J.-C. Saldae, après avoir été annexée par l'empereur Canigula, s'est équipée de nombreux ouvrages d'utilité publique, mais dont il ne subsiste aucune trace. En fait, le site dans sa configuration architecturale actuelle, en forme de proue de navire en rade, est le résultat d'un investissement almohade (XIIe siècle), remodelé ultérieurement au XVe siècle par les Espagnols qui en ont fait une forteresse militaire. A l'origine, la citadelle était conçue en guise de résidence royale et de lieu cultuel, sa mosquée ayant accueilli, entre autres érudits, l'illustre sociologue Ibn Khaldoun, qui y a enseigné la jurisprudence religieuse. Mais l'invasion ibérique a donné lieu à d'importantes transformations et ajouts, concrétisés au détriment de sa vocation initiale, totalement dénaturée. Plus tard, la présence turque puis l'occupation française surtout ont renforcé cette entreprise. Son érection en garnison s'est accompagnée de la création de nouvelles structures pour les besoins militaires, notamment les écuries, les cuisines et la boulangerie. Au lendemain de l'indépendance, il est resté en l'état quasiment livré à lui-même, et aux mains d'indus occupants qui en ont fait un lieu de transit pour réclamer un toit. Malheureusement, ces passages ont eu raison de l'endroit qui a subi de nombreuses dégradations dont l'exemple le plus éloquent aura été celui de la mosquée qui a failli partir en poussière, n?était une intervention d'urgence opérée en 1990. Car, depuis, les choses se sont nettement redressées. La mosquée a été restaurée dans son intégralité au prix d'un investissement de 30 millions de dinars et tous les alentours, notamment ses jardins, ont subi un toilettage conséquent. En outre, une étude en vue de réhabiliter le site dans son ensemble est engagée. Les autorités locales ayant misé sur le choix d'en faire un lieu culturel phare. L'option première qui se dégage est l'ouverture de salles d'exposition au sein de structures du château espagnol, la création d'un théâtre de verdure et l'aménagement d'espaces de loisirs (restaurants, cafétéria, etc.). L'idée est attrayante, mais attend, depuis 1995, d'être concrétisée.