Résumé de la 137e partie ■ Comme anciens et nouveaux lépreux se disputent le droit de juger Chantal, Tulio leur propose de la conduire chez Will. Les Hindous traversaient en courant le village chinois et en portant des torches ; dès que le feu avait été maîtrisé à un endroit, les Hindous lançaient leurs torches... Les maisons sur pilotis n'étaient pas longues à s'effondrer. Les Fidjiens pouvaient se consacrer entièrement à l'attaque de l'hôpital et au jugement de Chantal ; leurs alliés hindous leur rendaient un service inestimable en immobilisant les Chinois parmi les ruines de leur village. Pendant ce temps, les Néo-Zélandais ne restaient pas inactifs et s'étaient portés en masse sur la plage pour s'oppposer à toute tentative de débarquement. Les secours ne devaient pas arriver ! A un détour du chemin rocailleux, Chantal et son escorte dominèrent enfin la baie de Dallice. Elle y jeta les yeux avec l'espoir de voir poindre le bateau sauveur. La mer restait déserte ; le débarcadère en bois était en flammes. Les Néo-Zélandais avaient trouvé là le meilleur moyen pour empêcher le «Saint-John» d'accoster. — Si le vent d'ouest se met à souffler, déclara Tulio devant cette vision, les flammes atteindront la plantation d'hydnocarpus et c'en sera fait de la récolte de chaulmoogra ! Ils auront eux-mêmes brûlé la seule plante qui pouvait les guérir... Chantal ne savait plus où regarder, elle préféra avancer, les yeux fermés, tour à tour tirée et poussée par son escorte de boiteux et de borgnes. Ses oreilles résonnaient d'un étrange tam-tam lancinant, que l'on entendait dans toute l'île les lépreux se servaient de tambourins et de cloches en bois pour convier leurs frères à la révolte. Sans les voir, la jeune femme savait que derrière chaque arbre à pain, sous les goyaviers, dans le moindre chemin creux, rampaient des forcenés assoiffés de carnage. La haine envahissait peu à peu toute l'île, en imprégnait l'atmosphère. Et le tam-tam continuait, accompagnant les cris de mort, tandis que la montée interminable se poursuivait... Brusquement, un silence se fit dans l'escorte Chantal rouvrit les yeux. Elle était devant le fossé entourant la maison du plus grand des malades. Will était là, le corps entouré de ses bandelettes, sa cagoule sur la tête, assis sur sa natte devant sa porte. Il était immobile, semblant attendre que toute agitation cessât. Au loin les colonnes de fumée du village chinois et du débarcadère continuaient à monter dans le ciel bleu ; le bruit de la fusillade arrivait espacé ; le soleil commençait à décliner sur l'horizon, la mer était toujours déserte, le «Saint-John» n'arriverait jamais ! Seule la justice de Will pouvait sauver l'île. Chantal le sentit tellement bien qu'elle se laissa tomber à genoux en criant : — Will ! Au secours ! Ils veulent me tuer ! Ils sont tous devenus fous ! (A suivre...)