Cérémonial «Le mariage d?antan était différent de celui d?aujourd?hui. La mariée se distinguait de ses congénères. La cérémonie avait plus de charme», souligne khalti Baya. Les deux vieilles dames se rappellent leurs propres mariages : «Nous n?avons pas connu nos maris. De notre temps, la mère choisissait la future épouse de son fils. Elle la remarquait dans un mariage, au cimetière ou au hammam. Souvent, la patronne du hammam servait d?intermédiaire entre les deux familles. Elle connaissait toutes ses clientes.» Cette femme s?avérait une bonne source d?information et toutes les mères lui faisaient confiance. Tout commence au hammam, même la cérémonie du mariage. «Ce jour-là, la mariée est emmenée au bain. El-teyaba (la masseuse) vient chercher le panier de la mariée désigné par e?sapa, puis les jeunes femmes qui accompagnent la mariée arrivent. La mariée est alors installée dans une cabine à part. Son entrée, à la grande salle de bains, se fait sous les youyous et des chants à son honneur. Deux jeunes filles tiennent, de chaque côté, une bougie. La masseuse l?aide à se laver. A la fin de son bain, des gâteaux et des cherbette (mélange d?eau, de sucre et d?eau de fleur d?oranger) sont servis à toutes les femmes présentes au hammam.» La cérémonie du henné est organisée la veille du mariage et a lieu le jour du dîner de mariage. La belle-famille et ses invités sont conviés au dîner chez les parents de la jeune fille. Au moment du henné, des membres de la famille du marié montrent t?bak (un panier décoré contenant des savonnettes, des parfums, de l?argent et de l?or). Khalti Baya précise qu?«à l?époque, la famille de la jeune fille, au moment du chart (conditions pour sceller le mariage), exigeait un quintal de laine, un matelas de deux places, et un autre d?une place, des coussins, et un ensemble pour e?chora (la literie) en qomkha ou en halfa (qualités de tissus de 1er choix)». «A l?époque, lorsque la mariée était issue d?un milieu défavorisé, sa famille louait l?or pour une valeur de 4 à 20 dourous équivalant à 100 DA la fniyak (un coffret contenant divers bijoux)», se rappelle khalti Baya. «C?est l?machta (une jeune femme dont le métier consiste à s?occuper de la mariée pendant toute la cérémonie), qui loue ces bijoux. Elle est souvent l?intermédiaire entre les artisans bijoutiers et les clientes.» Le lendemain du henné, la mariée est préparée pour la cérémonie. Nos deux interlocutrices évoquent El khouwara (une coiffure destinée uniquement à la mariée), un rituel qui a disparu, depuis. Il s?agit d?«un ensemble de de 13 à 14 nattes, pliées en deux, les bouts ramenés au centre du crâne entourés de ruban rose qui descend jusqu?au menton qui sera noué au milieu» expliquent-elles. «Le visage de la mariée est décoré avec n?djoum wa l?kenthir (des étoiles), harqouss e?dheb (ces sourcils sont dorés).» Elles précisent qu?en ce temps-là, "e?tesdira (le défilé de toilettes que toutes les mariées font) n?existait pas». Elles se souviennent que «la mariée faisait son entrée avec un karakou (une veste en velours brodée de fils d?or ou d?argent) et un séroual de 12 mètres en Lanzo, m?kemech (froissé ou plissé) et porte m?harmet laftoul (un foulard) en or ou en argent (selon la broderie du karakou)». En revanche, «pendant sept jours, elle montera à la terrasse, en changeant chaque jour de tenue», raconte khalti Baya. Les mariages se fêtaient avec el aly (orchestre de chaâbi ou andalou) pour les hommes et lemsamaâ (orchestre féminin d?andalou) pour les femmes. «Aujourd?hui, le D. J. les a remplacés», regrettent ces grand-mères qui marieront bientôt leurs arrière-petits-enfants.