Question ■ Combien de fois a-t-on entendu dire, a-t-on pu lire qu'un tel acte, un tel comportement ou un tel dispositif est anticonstitutionnel ? De nombreuses fois en vérité. Mais presque jamais la partie accusée d'avoir violé le texte fondamental du pays ne se défend en recourant aux arguments juridiques pour prouver le contraire. Selon un ancien député, cette réalité est due essentiellement à un fait : «la Constitution n'est pas inscrite dans la société.» C'est pour cette raison d'ailleurs que les citoyens ne lui prêtent aucune attention. La Constitution est-elle «inapplicable», ou «inappliquée» ? Opter pour le premier terme signifie que ses textes ne répondent pas aux réalités sociales, culturelles et économiques, de notre pays. Par contre, opter pour le second terme signifie, à notre avis, qu'elle est violée. Mais ce qui n'échappe à personne, est que la Constitution est aussi entravée par un arsenal juridique élaboré contrairement à son esprit. Notre interlocuteur estime que si les Algériens ne consultent pas la Constitution, c'est parce qu'ils la considèrent comme «un papier», c'est-à-dire un document sans valeur. C'est le «contexte socio-économique» qui préoccupe, en premier lieu, les Algériens. En effet, dans les milieux populaires, la révision de la Constitution engagée par le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, au lendemain de son élection pour un quatrième mandat le 17 avril dernier, ne suscite ni débat ni polémique. Ainsi, le texte qui engage l'avenir du pays est synonyme d'inconnu. L'agenda présidentiel a voulu que la mouture de la nouvelle Constitution passe avant toute autre consultation électorale. Au total, ce sont 47 articles de la Constitution à avoir fait l'objet d'amendements. Pour se faire, le président de la République a confié la mission de consultations avec les partis politiques et les personnalités nationales à son chef de cabinet Ahmed Ouyahia. Celui-ci, dans une première étape a appelé des dirigeants de partis. Il les a informés qu'ils recevront les propositions d'amendements formulées par une commission d'experts. Dans une deuxième étape, partis politiques, personnalités nationales et associations seront conviés à des rencontres à la présidence de la République, au mois de juin, pour exposer et débattre et éventuellement émettre des contre-propositions. Une partie de l'opposition a rejeté l'invitation d'Ouyahia. Cette classe évoque «une crise de confiance» et «une crise de légitimité». En contestant la forme de la démarche du pouvoir, elle estime que le Président ne vise qu'à «se donner une légitimité». Pour parvenir à une Constitution consensuelle, estime-t-elle encore, il faut tout d'abord commencer par assainir le climat politique et par réhabiliter l'activité partisane. D'ailleurs, arguent les «boycotteurs» en 2011 les consultations menées par Abdelkader Bensalah n'ont rien donné. En outre, l'invitation de Abdelkader Boukhamkham, ex-dirigeant du FIS, par Ouyahia, est perçue comme un signal pour la réhabilitation éventuelle du FIS dissous. Si l'article 176 ne définit pas clairement la manière d'adoption de la Constitution - par référendum ou par vote au niveau des deux chambres -, la question qui se pose est celle de savoir qui garantit le respect de la Constitution.