Issue ■ L'opposition et la société civile du Burkina Faso ont élaboré, hier, leur projet de «charte» régissant le futur régime civil de transition, ouvrant ainsi la voie à une restitution rapide du pouvoir par l'armée à une autorité civile. «Nous venons de terminer l'examen et l'adoption de l'avant-projet de charte (...) le travail a été intense et laborieux», a commenté en début de soirée, à Ouagadougou, Zéphirin Diabré, chef de file de l'opposition, qui a présidé les travaux. Il n'a pas dévoilé le contenu du texte, dont la version finale devait être formellement adoptée ce dimanche. Le document sera ensuite transmis aux autorités militaires qui ont pris les rênes du pays après la démission et la fuite, le 31 octobre, du président Blaise Compaoré, chassé sous la pression de la rue, après 27 ans de pouvoir, a ajouté M. Diabré. Les divers protagonistes de la crise burkinabè se réuniront ensuite pour faire «une synthèse» des propositions des camps en présence, à savoir opposition et société civile, armée et camp du président déchu. Lorsqu'un document commun sera adopté, «tout devrait se mettre rapidement en place, les organes de la transition et notamment le président de la transition», a estimé Ablassé Ouédraogo, président du parti Le Faso Autrement (opposition), évoquant le milieu de la semaine prochaine. L'armée, invitée à participer aux travaux, hier, n'a fait qu'une brève apparition. En milieu d'après-midi, une délégation militaire conduite par le colonel Auguste Denise Barry s'est présentée dans le bâtiment administratif au centre de Ouagadougou, où se déroulaient les travaux. Cet officier est le bras droit du lieutenant-colonel Isaac Zida, actuel homme fort du «pays des hommes intègres», choisi par les militaires le 1er novembre. En treillis de camouflage et béret rouge, le lieutenant-colonel Barry s'est installé dans la tribune avec deux officiers supérieurs au premier rang. Tous trois ont quitté la salle une demi-heure plus tard. «Des contingences opérationnelles ne nous ont pas permis de dégager du temps», a expliqué le colonel Barry en sortant, ajoutant être seulement venu «encourager» les travaux. Selon plusieurs délégués de la société civile, l'officier a cependant fait un discours «encourageant», répétant avec force que l'armée n'avait pas l'intention de conserver le pouvoir. «Les choses ne peuvent plus être comme avant. Le peuple burkinabè est entré dans l'histoire, l'armée burkinabè doit aussi entrer dans l'histoire», a déclaré le colonel, s'attirant des applaudissements. Une manière de dire que le temps des putschs et des juntes militaires est fini pour le Burkina Faso, petit pays sahélien théâtre d'une succession de coups d'Etat militaires depuis 1966. Les acteurs de la crise ont déjà convenu mercredi dernier que la transition durerait un an et qu'elle sera dirigée par une personnalité civile, jusqu'à des élections présidentielle et législatives d'ici à novembre 2015. Blaise Compaoré, en exil doré en Côte d'Ivoire, a accusé, dans une interview à Jeune Afrique, l'opposition d'avoir comploté depuis longtemps avec l'armée pour le renverser.