Détresse «Depuis avril, nous ne savons plus où donner de la tête, se plaint Fouad, 30 ans. Nous avons frappé à toutes les portes, sollicité toutes les autorités,en vain.» L?angoisse des lendemains incertains est probablement le trait qui caractérise le plus les 43 familles sinistrées du quartier Bel-Air, situé à une centaine de mètres du siège de la wilaya d?Oran. Le 25 avril dernier, leur bâtiment, sis à la rue Bengoussa Benothmane s?effondrait, faisant un mort et trois blessés et, bien entendu, des traumatismes émotionnels chez un certain nombre de locataires. Des traumatismes d?autant plus importants que, ajoute-on encore, le drame était prévisible, presque inévitable, puisque toutes les autorités compétentes avaient officiellement constaté que la bâtisse en question était dans un état de ruine et qu?elle devait s?écrouler d?un moment à l?autre. «Mais, s?indigne Fouad, non seulement nous n?avons pas été relogés, mais l?on n?a même pas daigné nous offrir des tentes pour que nous puissions nous y abriter. Il a fallu que la drame arrive pour qu?on nous propose une crèche. N?est-ce pas criminel ?» La population oranaise avait également été ébranlée par ce drame, le souvenir de l?écroulement quelques années plus tôt d?une bâtisse dans le quartier voisin, Gambetta ? pas moins de six personnes y avaient trouvé la mort ? étant encore vivace. La pente abrupte que constitue la rue Bengoussa-Benothmane et qui serpente la rue Ahmed-Benabderrezak vers le quartier de Bel-Air, est aujourd?hui hérissée de «cases» construites à l?aide de matériaux hétéroclites. Tout ou presque a été utilisé pour ériger ces maisons de fortune : du plastique à la tôle en passant par la toile, des bouts de carton ou de bois? : «Nous essayons de nous protéger des aléas climatiques, en vain. Nous vivons un été infernal et craignons le prochain hiver.» Aléas climatiques mais aussi dangers d?apparition de maladies, notamment à cause des rongeurs. «Deux femmes ont déjà été mordues par des rats et beaucoup d?enfants sont malades», explique un voisin de Fouad. J?ai dû confier ma petite fille à des parents pour la soutirer à ces conditions de vie. Pour se rappeler au souvenir des autorités d?Oran, ces familles ont organisé lundi dernier une manifestation devant le siège de la wilaya (qui, comble d?ironie, se trouve à une centaine de mètres de Bel-Air) et exigé d?être reçus par des responsables. Peine perdue puisque, leur fut-il répondu, ils doivent attendre l?installation du nouveau wali. En attendant, ces sinistrés s?interrogent sur l?indifférence manifeste des responsables locaux : «Depuis avril personne n?est venu s?enquérir de notre sort. Ni les autorités locales ni le Croissant-Rouge algérien. A croire que nous sommes des étranger.» Pas si étrangers que cela puisque, comme ils le rappelleront avec amertume, ces responsables «ont quand même fait le déplacement pour la campagne électorale».