Portrait ■ René Vautier, ce Français anticolonia-liste qui avait adhéré à la cause algérienne, en filmant les maquis de la Révolution, s'est éteint, hier, dans un hôpital de Saint-Malo (Bretagne-France), à l'âge de 87 ans. Son premier film, il le réalise en 1950, il a pour titre Afrique 50. Ce documentaire a été censuré, interdit pendant plus de quarante ans, parce qu'il témoigne d'une réalité qui va à l'encontre du discours colonial, à savoir la mission civilisatrice de la France en Afrique. Avec Afrique 50, René Vautier, alors âgé de 21 ans, signe le premier film anticolonialiste français, chef-d'œuvre du cinéma engagé, qui lui vaudra 13 inculpations et une condamnation de prison. Son film reçoit la médaille d'or au festival de Varsovie.Plus tard, René Vautier, considéré comme un homme de terrain, s'engagea en Afrique sur divers tournages. D'ailleurs, l'Afrique devenait le front sur lequel il militait pour les causes justes, dont notamment la cause algérienne. C'est ainsi que, dès 1956, il rejoint clandestinement, la caméra sur l'épaule, les maquis algériens et participe à la lutte révolutionnaire pour l'indépendance de l'Algérie. Il filme alors la Guerre de libération nationale, il rapporte des images des moudjahidine dans leur combat pour la décolonisation. Celui qui avait soutenu la lutte armée pour l'indépendance de l'Algérie, en lui consacrant plusieurs de ses films, tourne dans les Aurès, les Némentchas, ainsi qu'à la frontière tunisienne, filmant ainsi les maquisards de l'Armée de libération nationale (ALN). Ces images sont aussitôt portées au regard du monde et donnent, par conséquent, un visage de la Révolution algérienne, une lutte pour l'indépendance de l'Algérie jusque-là ignorée par l'opinion internationale. Il signe Une nation, l'Algérie, un film sorti en 1954, juste après le déclenchement de la guerre de libération et qui sera interdit et vaudra au cinéaste une condamnation pour atteinte à la sûreté intérieure de la France. En 1958, il réalise aussi Algérie en flammes (page inexistante), un autre film sur la lutte de l'ALN, qui vient le consacrer dans son engagement. A l'indépendance, René Vautier va s'installer à Alger, où il est nommé directeur du Centre audiovisuel et ce, de 1962 à 1965 – cette structure est destinée à former les futurs cinéastes et techniciens de l'Algérie indépendante. Il y est aussi secrétaire général des Cinémas populaires. Il filme les premiers jours de l'Indépendance algérienne. C'est ainsi qu'il réalise en 1963 Un peuple en marche, un film qui fait le bilan de la guerre d'Algérie en retraçant l'histoire de l'ALN, tout en montrant l'effort populaire de reconstruction du pays après l'indépendance. En 1972, il signe Avoir vingt ans dans les Aurès, une fiction qui obtient le Prix international de la critique du Festival de Cannes. En 1984, il fonde «Images sans chaînes», une société de production indépendante puis continue à tourner entre la France et l'Algérie, principalement des documentaires films sur l'immigration et la citoyenneté française comme Immigration Amiens. D'autres films suivront, toujours dans le même élan engagé du cinéaste, dont Le racisme en France (1984) et Vous avez dit français ? (1990). En novembre 2014, la Cinémathèque algérienne a rendu hommage au cinéaste à l'occasion du 60e anniversaire du déclenchement de la lutte armée pour l'indépendance de l'Algérie. Tout au long de sa carrière, René Vautier, né le 15 janvier 1928 à Camaret-sur-Mer (Finistère), a utilisé sa caméra pour témoigner des luttes de son époque.