Résumé de 3e partie Comment Etienne Girard a-t-il fait fortune ? Les légendes foisonnaient sur l?origine de ses biens? pas toujours bien acquis. Le plus extraordinaire, d'ailleurs, c'est ce qu'il va faire de ce premier million de dollars... Mais pour l'instant, le Bordelais borgne essaie de résoudre le problème de sa femme. Il lui fait faire plusieurs séjours à la campagne sans que son insatiable appétit sexuel diminue. Alors, les séjours à la campagne deviennent des séjours dans une «maison de repos». Puis le séjour y devient permanent. Polly a un enfant d'Etienne, né dans cet asile. Malheureusement, il ne vit que quelques semaines. Lorsqu?enfin, Polly meurt à son tour, après qu'on eut descendu le cercueil dans la fosse, Etienne qui, n'a pas prononcé une seule parole depuis la levée du corps, se tourne vers un ami et lui dit : «Tout est très bien.» Puis il vaque à ses affaires comme à l'ordinaire après avoir signé un chèque de trois mille dollars de gratification à l'administrateur de l'hôpital, une attitude qui sera jugée très sévèrement par ses contemporains. Mais il a d'autres préoccupations : le gouvernement de Washington, ayant créé la US Bank, décide, en 1812, de ne pas renouveler sa charte d'exclusivité. Etienne Girard rachète la US Bank qui devient la banque Girard. Il vit très modestement, fréquentant à peine les commerçants et les financiers de Boston, New York et Philadelphie. Vêtu sans élégance, il évite de se rendre en voiture là où il peut aller à pied. Il est aussi dédaigneux de la société des riches qu'insensible à la misère des pauvres. Mais le 6 avril 1813, Girard sauve la République des Etats-Unis de la faillite en faisant souscrire aux clients de sa banque, avec sa garantie personnelle, sept millions de dollars qu'il va lui-même remettre au Trésor. On parle d'Etienne Girard dans toutes les circonstances et grands événements de l'époque. On lui demande de renflouer des industries, de financer des révolutions, des croisades, des royautés en détresse, d'aider à sortir Napoléon de Sainte-Hélène, etc. Quand ses employés le regardent, l??il critique, il leur dit : «Mon ?uvre parlera pour moi.» Et en effet, en 1978, elle parle encore pour lui... grâce à un extraordinaire testament. Le 16 février 1830, Etienne Girard, le banquier le plus riche d'Amérique (on l'appelle d'ailleurs désormais Old Stephen), regarde sans mot dire les hommes de loi qu'il a réunis dans sa salle de conférence de Philadelphie. Ceux-ci lui tendent, l?un après l'autre, des documents qu'il signe et dont l'énorme pile constitue son testament. Old Stephen, prématurément usé par une vie trop laborieuse et trop sévère, a pris un coup de vieux vers les cinquante ans. Mais depuis, il n'a pas bougé. A quatre-vingts ans, la laideur qui a certainement désespéré sa jeunesse est maintenant masquée par les rides, la vivacité, la dureté de l'expression, l'intelligence du front. ? «Merci, messieurs, est-ce que tout est en règle ? ? Oui, monsieur, répondent les trois hommes de loi qui ont travaillé pendant des semaines. Tout est en règle, parfaitement légal, inattaquable.» Le 30 décembre de l'année suivante, à peine est-il mort que sa famille apparaît immense. Il a des cousins et des neveux partout : certains qu'il avait aidés sans les avoir jamais vus, d'autres qu'il avait volontairement ignorés. Tout ce petit monde, qui l'a toujours traité de vieux grigou, accourt et fait tant et si bien que devant cent mille habitants de Philadelphie, plus curieux qu'attristés, Etienne Girard, l'athée, le franc-maçon qui détestait les prêtres, est conduit à l'église. Les francs-maçons sont tellement convaincus que c'est contre sa volonté qu'ils s'emparent du cercueil au milieu de la nef ! Malgré ces scandales, Old Stephen finit tout de même là où il doit finir : dans un trou du cimetière. Mais c'est quand même lui qui a le dernier mot. Quand ses inabordables parents se pressent devant les notaires et les avocats pour entendre le testament, c?est la stupeur dès les premières lignes. (à suivre...)