Métier ■ L'histoire qui va suivre est très célèbre en haute Kabylie. On pense qu'elle a eu lieu au 17e siècle. Elle met en scène un forgeron qui avait rendu d'immenses services aux habitants de son village et qui avait été blessé dans son amour-propre par leur ingratitude et leur mépris. Chaâbane, raconte la légende, n'avait que 14 ans lorsque mourut son père, lui léguant pour unique fortune une grotte où il exerçait le dur métier de forgeron. La mort de son père avait été ressentie comme une immense perte par tous les villageois parce que leur travail dépendait largement de l'activité du forgeron. C'était lui qui leur fabriquait les outils avec lesquels ils travaillaient, de la pioche à la faucille en passant par l'araire, les haches et les couteaux. Oh ! Oui, bien sûr, il y avait d'autres forgerons dans les villages alentour mais leur travail était loin d'égaler celui du père de Chaâbane. Ce dernier avait passé toute son enfance à regarder son père s'affairer dans la forge, si bien qu'il avait appris tous les secrets de son métier. Le premier travail du jeune Chaâbane fut de satisfaire les commandes qui avaient été passées auprès de son père quelques jours avant qu'il ne se mette à tousser et à cracher du sang. Il s'agissait d'une hache et d'un araire. Les deux villageois avaient beau examiner les outils que Chaâbane leur avait fabriqués, ils ne purent que constater avec bonheur que le fils travaillait aussi bien que son père. Ils en parlèrent autour d'eux et les villageois se remirent à se diriger en masse vers la grotte qui faisait office de forge. C'étaient les premiers clients qui lui avaient demandé de leur confectionner des outils de travail qui avaient colporté la bonne nouvelle. Belkacem, l'agriculteur, était si heureux devant l'efficacité de son nouvel araire qu'il s'était mis à labourer en chantant. Cela avait étonné plus d'un parce qu'il avait toujours été de caractère austère. (A suivre...)