Influences n Lalla Fatma n'Soumeur a grandi dans un univers maraboutique fortement empreint de rigorisme. Elle étudiera le Coran et la langue arabe dans le giron de l'enseignement prodigué par la zaouïa Rahmania, la confrérie qui embrasse tous les marabouts de Kabylie. En raison de sa forte personnalité, de sa beauté, de sa piété, on voulut la marier très tôt. Il se trouve qu'elle rejetait tous les prétendants qui se présentaient à elle. Elle finit par céder à la pression familiale et accepter un de ses cousins Les noces seront de courte durée. Certains disent qu'elle a fugué au bout de trois jours, d'autres qu'elle a été rendue vierge à sa famille au bout d'un mois. Quoi qu'il en soit, on commençait à la redouter. « Ses frères ont compris qu'elle était différente, qu'elle avait un don». «Fatma n'Soumeur devait mener un double combat : à la fois comme femme pour arracher sa liberté, et en même temps comme combattante dans sa résistance à l'occupant». C'est sans doute cet esprit frondeur et impavide qui l'érigera en icône des mouvements féministes. «Les historiens ne soulignent pas assez le fait qu'elle est issue d'une famille maraboutique où les femmes sont sévèrement contrôlées». Femme étrange, femme de caractère, femme crainte, femme savante, femme battante, elle avait, semble-t-il, des dons prémonitoires, si bien qu'elle sera surnommée la «Prophétesse». Lorsqu'à partir de 1844, les troupes françaises commencent à gagner la Kabylie, elle fait preuve d'une conscience politique et nationaliste précoce. Elle a à peine 24 ans lorsqu'elle organise la résistance contre l'envahisseur. On est en 1854 et elle martèle : «Ennif ayathmathen», «Ennif mes frères !» Un siècle d'avance sur la révolution de novembre ! Elle achète des armes aux Turcs, elle envoie des émissaires dans tous les archs, elle mobilise les femmes, aiguillonne les chefs de tribu, appelle au djihad. Très vite, son aura rayonne dans toute la Kabylie, et la voici, elle, la femme, la fille de marabout, à la tête de plus de 7 000 hommes. Certaines sources parlent même de 45 000 hommes. Sous sa houlette, la Kabylie devient plus qu'un état d'âme, un Etat tout court. Elle infligera des pertes inouïes à l'arrogant maréchal Randon et à ses troupes entre 1854 et 1856, à Azazga, à Tachkirth, à Larbaâ Nath-Irathen. Mais c'est sans doute dans la grande bataille d'Ichariden qu'elle montrera la pleine mesure de son courage et de son talent de stratège. L'armée française, conduite par Bugeaud, dut battre en retraite sous les assauts de Lalla Fatma et ses vaillants combattants. La stèle élevée céans est dans un état lamentable Les plaques qui immortalisent ce moment sont arrachées. Des gravats encerclent le monument Tout autour, des hectares de maquis ravagés par les flammes comme l'oubli ravage la mémoire Troublant paysage et troublante métaphore. «C'est ici que le général Bugeaud a laissé sa canne», Vrai ou faux ? «Le problème de la Kabylie est que son histoire est orale».