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Qui se bat ? Et contre qui ?
Publié dans Info Soir le 16 - 02 - 2016

Imbroglio n Guerre totale en Syrie, où les fronts se multiplient, où certains acteurs extérieurs s'impliquent de plus en plus, où chacun poursuit des objectifs différents. Le tout sur fond d'escalade entre deux protagonistes majeurs, Moscou et Ankara. Qui se bat en Syrie, et contre qui ?
D'abord il y a les alliés de Damas, la Russie et l'Iran, qui soutiennent depuis le début du conflit en 2011 le régime du président syrien Bachar al-Assad, et interviennent sur le terrain de façon décisive. Si leurs objectifs finaux ne sont pas les mêmes, ils apparaissent soudés dans leurs objectifs d'annihiler l'opposition et de maintenir le régime. Moscou, pour qui la Syrie est le dernier point d'influence dans la région, et qui voit avec ce conflit un moyen de s'affirmer face aux Etats-Unis, est à la manœuvre depuis fin septembre 2015. Son aviation est entrée en action, officiellement pour frapper des cibles «terroristes». De l'aveu même de son chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, la Russie a aujourd'hui «renversé la situation» et permis au régime de Damas, en difficulté en 2015, de reconquérir des points dans l'Ouest, le Sud, et surtout le Nord, où les forces pro-régime, appuyées par les bombes russes, sont à l'offensive. Lancée le 1er février, cette poussée dans la région d'Alep, quasiment encerclée par les forces pro-régime, a fait au moins 500 morts civils selon une ONG syrienne, et poussé plus de 50 000 personnes aux portes de la Turquie, dont la frontière reste fermée. Pour sa part, L'Iran, qui a envoyé des milliers de «conseillers militaires» en Syrie et qui soutient le régime de Damas par le biais de la milice chiite libanaise du Hezbollah et surtout des milices chiites irakiennes, se bat par procuration contre son ennemi et rival régional numéro 1, l'Arabie saoudite. Téhéran a mis en garde ce week-end Riyad contre l'envoi de troupes en Syrie. Face aux alliés de Damas, qui n'ont pas varié d'un pouce, le camp «anti-Assad» est désuni. La stratégie du rouleau compresseur russe a pris de court les Occidentaux (qui prônent une solution politique) et surtout entraîné une réaction virulente de la Turquie et, dans une moindre mesure, de l'Arabie saoudite. Depuis quelques jours, l'escalade verbale se développe entre Ankara et Moscou, déjà à couteaux tirés depuis la destruction par la Turquie fin novembre d'un avion militaire russe accusé d'avoir violé son espace aérien. De son côté, Riyad, qui mène par groupes rebelles interposés une guerre contre l'Iran en Syrie, a annoncé une implication grandissante sur le terrain. Se disant disposé à envoyer des forces spéciales en Syrie, l'Arabie saoudite, qui fait partie de la coalition pilotée par les Etats-Unis contre le groupe EI, a déployé ce week-end des avions de combat sur la base turque d'Incirlik, pour «intensifier les opérations aériennes contre l'EI».
L'obsession de la Turquie
l Ankara est hostile au régime d'Assad et soutient des groupes rebelles, notamment islamistes, en Syrie. Mais la Turquie est avant tout obnubilée par les forces kurdes en Syrie, soupçonnées de visées indépendantistes et qu'elle considère comme une émanation du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), avec qui elle est en guerre sur son territoire. Or, l'offensive russo-syrienne dans le Nord et l'affaiblissement de la rébellion ont permis aux Kurdes d'avancer et de reprendre le contrôle de plusieurs localités. Inacceptable pour Ankara, qui craint de voir les Kurdes syriens étendre leur influence à la quasi-totalité de la zone frontalière. La Turquie bombarde depuis trois jours des positions kurdes dans le nord de la Syrie, malgré les appels de Washington et de Paris, à la fois alliés d'Ankara au sein de l'Otan, mais qui soutiennent également les Kurdes syriens, considérés comme les plus efficaces dans la lutte contre les djihadistes de l'EI.
Echange d'accusations
l Les Etats-Unis bombardent l'EI depuis septembre 2014 en Irak et en Syrie (et mènent l'essentiel des frappes de la coalition), mais le président américain Barack Obama, artisan du désengagement d'Irak, ne veut pas renvoyer de troupes au sol dans la région, fixant d'autres priorités à sa politique étrangère. En outre, les Etats-Unis sont en pleine campagne des primaires pour la présidentielle de fin d'année. Ils sont accusés par leurs alliés occidentaux, notamment la France, de ne pas s'engager assez et de faire preuve d'«ambiguïté» en faisant trop de concessions à la Russie.
Merkel pour une zone d'exclusion aérienne
l La chancelière allemande, Angela Merkel, dans un entretien au journal Stuttgarter Zeitung, se prononce pour l'instauration d'une zone d'exclusion aérienne en Syrie. «Dans la situation actuelle, il serait utile d'avoir une zone où aucun des belligérants ne mènerait d'attaque aérienne, une sorte de zone d'exclusion aérienne», déclare-t-elle dans cet entretien à paraître ce mardi.
Importante avancée des Kurdes
l Les forces kurdes ont conquis hier un important bastion des rebelles syriens dans la province d'Alep, dans le nord de la Syrie, où ces derniers perdent du terrain, a indiqué l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance de combattants kurdes et arabes, ont pris hier soir le contrôle de la ville de Tall Rifaat jusque là aux mains de rebelles islamistes, a précisé l'OSDH. Les FDS ont réussi à s'emparer de toute la ville malgré la poursuite des frappes turques qui visaient à arrêter l'avancée des Kurdes. Cela faisait plusieurs jours que les combattants kurdes resserraient l'étau sur Tall Rifaat, l'un des derniers bastions de la rébellion dans la province septentrionale d'Alep. Cette victoire est un nouveau coup dur pour les rebelles qui ont essuyé plusieurs revers face au régime qui a lancé une offensive d'envergure le 1er février avec l'appui de l'aviation russe.


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