Parcours n Dans ses créations, Ahmed Khemis puise dans l'héritage ancestral «La flamme du Sahara» est une pièce chorégraphique produite par le ballet national et conjointement composée par Ahmed Khemis et Fatima Zohra Namous. L'originalité de cette chorégraphie, qui a été présentée la semaine dernière à Alger, réside certes dans son style contemporain mais auquel l'artiste intègre plusieurs composantes de la culture populaire algérienne. Le spectacle se déroule et évolue autour d'une légende populaire algérienne. C'est dire que le chorégraphe puise son inspiration dans le patrimoine. Et il n'en est pas à sa première expérience. Outre le patrimoine, c'est le désert qui se transforme en un lieu d'expression et de création. Ce natif de Ouargla trouve et dans le patrimoine et dans le désert sa source d'inspiration. En effet, continuellement inspiré par le désert, son climat et son mode de vie (son histoire, ses traditions, ses mythes, ses croyances…), Ahmed Khemis transmet dans ses compositions chorégraphiques cet attachement à cette réalité, qui est son origine, son identité culturelle et historique. Ainsi, dans ses créations, Ahmed Khemis puise dans l'héritage ancestral. Et dans «Le voyage de Boussâadia », l'artiste fait revivre le personnage folklorique de Baba Salem, qui n'est autre que Boussâadia et ce, à travers une adaptation contemporaine. En s'exprimant sur ce travail, il dira : « Bousaâdia est le premier personnage que j'ai vu dans ma vie et qui m'a fait découvrir le mouvement de la danse c'est lui, Baba Salem comme on dit en Algérie. J'ai vu cela à Ouargla d'où je suis originaire alors que j'avais quatre ans je crois, dans le quartier. Il passait avec un costume très coloré et portant un masque et nous, gamins, nous en avions peur... Et du coup, l'idée était de revenir aux sources pour faire quelque chose de nouveau, par rapport à la danse. J'ai dû faire des recherches autour ce personnage et, en m'inspirant de lui, j'en ai fait un spectacle.» Ce qui donne du caractère et du contenu à ses chorégraphies, aussi bien dans «Le voyage de Boussâadia» que «Voyage de poussière» ou «Transe», ce sont bien ses influences. En effet, avec ses inspirations soufies, maghrébines et africaines, son travail de recherche sur la gestuelle et l'environnement dans lequel s'expriment ses pièces, Ahmed Khemis impose aujourd'hui en Occident une signature proche d'un courant ethnique novateur dans la danse contemporaine. Et d'une chorégraphie à l'autre, il fait souvent voyager le public dans un univers spirituel empreint de musique soufi du Maghreb et de l'Orient, du rapport de l'homme à la terre et à son environnement, en convoquant souvent sur scène musiciens, comédiens et poètes. D'où d'ailleurs l'objectif de son travail, celui qui consiste à faire connaitre ce patrimoine et cette richesse culturelle, qui est notre identité et notre histoire. Et à propos de ses inspirations qui relèvent de quelque chose de très spirituel à la base, le chorégraphe dira : «C'est notre patrimoine. Je m'inspire de lui ne serait-ce que pour l'amener à l'international. Je suis danseur chorégraphe, j'amène notre art à l'extérieur. Je veux montrer ma culture, la développer, la faire partager dans le monde entier.» Yacine Idjer l Ahmed Khemis a déjà réussi, au fil de ses créations, «à imposer une signature reconnue par ses pairs dans le milieu de la danse contemporaine en Europe, se distinguant par une énergie explosive et une spiritualité palpable jusque dans le mouvement». Et voilà ce qu'on dit de celui qui suscite autant d'admiration sur les planches que lorsqu'il s'attelle à façonner une chorégraphie : «Derrière son look très particulier, dreadlocks et tenues chic urbaines, se cache un chorégraphe rigoureux, intransigeant et très difficile à satisfaire s'inspirant énormément de son enfance, de son environnement familial, de personnages universels, de gestuelle animale, de danses tribales ou encore de "battles" de Break Dance.»Sa passion pour la danse remonte à sa plus tendre enfance quand il imitait son frère aîné, danseur de hip-hop et de smurf à Ouargla, avant que la famille ne quitte l'Algérie pour s'installer en Tunisie où il entame des formations dans cette discipline et rencontre des troupes et des artistes urbains.C'est à l'âge de 19 ans qu'il intègre le Centre national de la danse contemporaine d'Angers (France) où il s'ouvre à l'histoire de l'art, au cinéma, au théâtre et découvre par là même l'univers académique de la danse contemporaine. C'est dans cette école qu'il présentera en 2003 sa première création, «Grottes», avant de fonder, toujours en France, la compagnie «Jaoua». En 2009, Ahmed Khemis reviendra pour la première fois au pays pour un spectacle lors du second Festival panafricain d'Alger, avant de marquer les esprits en 2012 avec «Le voyage de Boussâadi» lors du Festival international de danse contemporaine qui le convie, à nouveau en 2015, pour présenter « oyage de poussière». Y. I.