Sensibilité n «L'Empire des mots» est l'intitulé du recueil de poèmes signé par Fadhel Zakour et paru aux éditions Edilivre (France). Le recueil comprend une soixantaine de poèmes, tous écrits dans la règle du 5e art, c'est-à-dire des vers composés dans un style recherché, donc inspirés, comme si le jeune poète était habité par une muse, traversé par une voix qui, dans son for intérieur, lui insuffle des mots taillés sur mesure, adéquats, ces matériaux appropriés à la construction de son univers poétique, des mots délicatement travaillés, dits cependant sans tergiverser, spontanément, dans une expression que l'on peut qualifier d'impulsive. Dans ses déambulations poétiques, des promenades au détour des vers et des strophes, il y a en effet de la spontanéité, de l'impulsion, ce qui laisse à croire – et surtout à ressentir – que le jeune poète est poussé par une force intérieure incontrôlée pour expulser dans un jet ruisselant ce qui s'agite en lui, exprimer dans l'éloquence du verbe son ressenti dans le but de partager celui-ci avec d'autres sensibilités. Chaque poème est comme un battement de cœur, et il est imaginé comme un émerveillement de tout un instant, il est conçu comme le lieu par excellence du ressenti, celui de notre poète, et par lequel ce dernier, en donnant libre cours à son inspiration, dévoile toute l'étendue de son imaginaire poétique. Un univers où sont dits «à la mesure du splendide» des sentiments les plus profonds, des onirismes démonstratifs et de subtiles métaphores, le tout apparaît, prend forme et se déploie dans d'étonnantes réalités fantasmagoriques. Ce n'est pas pour nous illusionner par des tours d'apparition ou de disparition ou encore de substitution, mais pour nous convier – et c'est le terme – à vivre des expériences, les siennes, et à en faire nos propres expériences. Les émotions, qui sont d'une grande impressionnabilité et que le jeune poète étale sans retenue d'un poème à l'autre, parlent d'amour, comme dans le poème «Blanche», où ce dernier est envahi par les pensées de celle pour qui il éprouve des sentiments qui le submergent et déferlent sur lui comme «une pluie torrentielle», ou encore dans le poème «Jasmin», dans lequel le poète va chercher au plus profond de lui-même toutes ces paroles pour s'adresser à celle qui a capturé son cœur. Et c'est en ces termes qu'il lui parle : «J'ai hâte, j'ai soif, j'ai envie de te voir/Je feuillette les jours, espérant te trouver / Sur les chemins obscurs je ne crains de choir / Même exténué, je vivrai pour le prouver…» Le poète, emporté par «un engouement enchanteur», use de «mots débordants» pour délivrer chaque soupir, «comme une nuit délivrant l'aube». Et celle à qui il s'adresse lui «procure des envies d'évasion». En effet, la poésie de Fadhel Zakour est un moment d'évasion et l'instant d'une escapade, on est transportés vers des ailleurs rythmés par la rime. Un moment d'évasion mais aussi un instant de délire puisque le poète, «anesthésié de la tête aux pieds» «clame dans les déserts» ses «envies frustrées». Et d'un vers à l'autre, notre poète, irrigué par «des passions fluviales», «répand l'émerveillement» et cherche à «extraire le beau du factice». «Mes émotions se décuplent, elles grandissent», déclarent-il sur un ton qui exprime «des vœux brasés, incessants. Ses poèmes parlant «dans un déploiement de magnificence révélateur» de passion sont dits dans l'embrasement des sens expulsés avec autant de ferveur que de profondeur ; chacun est comme un «ineffable béguin», comme une «irrépressible égérie».