Attente La jeune femme est venue pour sa chimiothérapie. Ce n?est pas pour aujourd?hui, lui signifie-t-on. La salle d?attente déborde de patients. Il faut attendre longtemps. Dès qu?elle monte les escaliers du département de cancérologie Pierre-et-Marie-Curie, difficilement, le visage livide, appuyée sur sa mère, la jeune malade lit la pancarte suspendue juste à l?entrée «Hôpital en grève». Elle s?arrête immobilisée par la nouvelle. «C?est sérieux ce qui est écrit. Personne ne travaille ! ?» L?un des deux infirmiers qui discutent devant le grand portail répond : «Oui, tous les services sont paralysés. Vous pouvez entrer et vous renseigner.» La malade entre et se dirige lentement vers le département d?oncologie (chimiothérapie) pour confirmer son rendez-vous. Avant d?arriver au bureau d?auscultation, elle s?assoit sur le rebord d?un muret, ne pouvant plus faire un pas. «Assieds-toi ma chérie. Je vais parler au médecin et je vais voir s?ils travaillent.» La vieille dame, au visage épuisé, accourt, paniquée, monte les escaliers et au bout d?un quart d?heure d?attente revient et retrouve sa fille souffrante. «Ils m?ont dit de te faire monter. Fais un effort, nous allons monter les escaliers, nous irons tranquillement.» Les deux femmes rejoignent le service. La mère est obligée de demander à l'une des femmes assises de céder la place à sa fille incapable de se tenir debout. La salle d?attente déborde de patients. «C?est un décor quotidien, il y a beaucoup de monde. Le personnel travaille. Les gens viennent prendre des rendez-vous et confirmer leur prise en charge. Il faut qu?ils passent par ce bureau», précise un citoyen. L?attente est longue et épuisante. La douleur se mêle au désespoir. Un vieillard, assis dans un fauteuil roulant, attend avec sa fille. De temps à autre, il crache dans un mouchoir à papier. Il est là depuis le matin et il attend son tour. Un corps famélique et un visage froissé, dévoré par la maladie. Les travaux de rénovation qui s?effectuent dans le service attisent la colère et la tension. le désordre règne, des pinceaux et des pots de peinture, des planches et des armoires ici et là. On y étouffe ! D?autres citoyens traînent dans les services, suppliant les personnels de les soigner. Une réponse froide. «Nous sommes en grève, revenez un autre jour» «Quand ?» «Nous ne savons pas, lorsque le ministre prendra en charge nos revendications.» La seule réponse qui revient sur la bouche des travailleurs.