Le staff médical du service proteste, les malades «pleurent» et les visiteurs s'angoissent de l'attente prolongée. Les malades gémissent. L'écho nous parvient sous forme d'éclats de rire du personnel paramédical se dilatant la rate, au fond du couloir. Le rire accompagné du brouhaha des visiteurs s'estompe. Voici une image de l'ambiance qui a caractérisé le service d'hospitalisation jour d'oncologie médicale, Pierre et Marie Curie, que nous avons visité la semaine dernière. En effet, outre la douleur de la maladie, les patients souffrent le martyre dès qu'ils mettent le pied à l'entrée de l'hôpital Mustapha. Tout le monde se plaint quant aux conditions de travail, d'accueil et d'hospitalisation, jugées «déplorables». Le staff médical du service proteste. Les malades «pleurent». Les visiteurs angoissés de l'attente prolongée. Cet état de fait, nous l'avons nous-mêmes constaté, lors de cette visite guidée. La situation est vraiment inquiétante. Manque de salles, manque de médicaments, et le manque d'équipements, on le ressent vite. Les cancéreux sont doublement victimes. Leur calvaire ne se limite pas seulement à la maladie, car ils souffrent aussi de ces insuffisances. Qu'on en juge : un service qui reçoit des milliers de malades ne dispose que de deux petites salles pour l'hospitalisation de jour, une petite salle pour la chimiothérapie, également utilisée comme vestiaire par le personnel paramédical et une autre salle utilisée comme bureau par neuf médecins! A l'entrée du service d'abord. Avec une petite table, une chaise et un registre, en plein couloir, c'est la réception. A un mètre d'ici, se trouve encore une autre table. Celle-ci est réservée pour l'enregistrement. Quant aux salles d'hospitalisation, le service dispose uniquement de deux salles pour 22 personnes. A l'intérieur même de ces salles, se trouve un autre bureau de deux à trois m², réservé pour les entretiens et la réception des parents. Pis, vu le manque de place, des hommes sont hospitalisés dans la même chambre que les femmes. «Que voulez-vous qu'on fasse? On est obligé de les garder. Comme la salle hommes est complète, on les a mis ici aux cotés des femmes», explique un médecin. Juste à côté, se trouve une grande salle équipée d'une dizaine de tables. Là, c'est le bureau des médecins, dont le nombre est de neuf. Comment jugez-vous vos conditions de travail? A cette question que nous avons posée aux médecins rencontrés, la réponse a été: «Comme vous le constatez, on travaille dans des conditions vraiment décourageantes et démotivantes. On ne peut même pas faire un entretien avec nos patients dans la discrétion. Car chaque médecin est là avec son patient. Il n' y a pas de confidentialité. Cela sans compter le bruit dans les couloirs qui nous déconcentre vraiment.» Sortant de cet endroit, on entend soudainement un bruit assourdissant provenant de l'autre côté. Ce sont des infirmières et des infirmiers qui racontent des blagues dans la salle de chimiothérapie. «Cette petite salle sert à beaucoup de choses. Ici on fait la chimiothérapie aux malades, on l'utilise comme vestiaire etc.», raconte un infirmier. En quittant le centre, un autre mouvement hystérique provoqué cette fois-ci par les malheureux malades et visiteurs qui sont là à attendre leur tour depuis quelques heures. «Je suis là, cela fait un bon moment, mais je suis vraiment dégoûté d'attendre longtemps, pour entendre ensuite les mêmes chansons chantées à chaque fois, à savoir, qu'il n'y a pas de place, qu'il n'y a pas de médicaments et autres consommables...», déclare un malade, avant qu'un de ses proches lui prenne la parole pour nous lancer: «Ici, même les gens qui viennent en bonne santé retournent chez eux malades à cause de ces scénarios d'attente et du manque de...tout.» Ce qu'il faut retenir enfin, c'est que la situation est vraiment cauchemardesque pour ne pas dire plus. Pour en savoir plus, il suffit juste d'avoir le courage de faire un saut à ce centre.