Métier n Les femmes chargées de la confection de la zlabia sont interdites de révéler le secret de la recette, même à leurs parentes ou amies les plus proches. En dépit des années qui passent, la zlabia de Boufarik, une pâtisserie réputée de cette ville, cuite en friture et gorgée de miel, continue de faire le bonheur des jeûneurs durant le ramadan, dont l'iftar et les soirées ne pourraient être ce qu'ils sont sans cette indétrônable douceur sur la table. Le visiteur à Boufarik, une ville située à une vingtaine de km du chef-lieu de wilaya de Blida et à 30 km de la capitale Alger, durant ce mois béni de ramadan, est facilement happé par la multitude de commerces aux devantures bien apprêtées pour l'accueil de ce mois sacré, synonyme pour eux de vente de la pâtisserie préférée des jeûneurs algériens, «zlabiette Boufarik». Une pâtisserie dont le goût authentique aurait toutefois perdu de sa splendeur, selon des habitants de Blida, qui estiment que la véritable zlabia de Boufarik ne se trouve guère chez ces vendeurs ayant pignon sur rue, mais plutôt chez quelques familles boufarikoises, qui ont su préserver ce goût distingué, dont le secret est jalousement perpétué de père en fils. Pour la famille Aksil, l'invention, ou plutôt la découverte de la zlabia est le fruit d'un heureux hasard. Car selon la légende perpétuée jusqu'à ce jour, une dame de cette vieille famille voulait préparer du s'fendj (sorte de beignet à l'huile), sur une demande expresse de son mari, mais la malheureuse rata complètement sa recette et, pour ne pas perdre la face, elle présenta à son mari un gâteau à la forme bizarre, en lui disant «zala- Bia», qui veut littéralement dire «j'ai fauté». Le mari goûta le gâteau qui lui plut, et en redemanda, et c'est ainsi que naquit la belle zlabia de Boufarik, pour devenir avec le temps la douceur préférée de beaucoup de gens. A un certain moment, la zlabia de Boufarik pénétra même, dans les arcanes de l'ex-prison de Serkadji, lorsqu'un détenu de la famille Aksil l'y introduisit en 1956, au grand bonheur de ses codétenus qui l'apprécièrent et en redemandèrent, selon le fils de ce moudjahid détenu, Abdelkrim Aksil. Encore plus, M. Aksil a assuré à l'APS que la zlabia de Boufarik était considérée durant, la guerre de Libération nationale, comme un présent précieux, qui était acheminé aux moudjahidine à dos de baudet. Poursuivant son récit captivant, Abdelkrim Aksil a souligné que ce gâteau était dans le passé préparé une seule fois dans l'année, soit durant le mois sacré seulement, d'où l'engouement impressionnant dont il jouissait chez les gens de l'époque. Au début des années 20 du siècle dernier, la Zlabia était confectionnée à Dar Nakous, de Haï Laksari, puis vendue au niveau de «zenqate Laâreb» à Boufarik. Elle était cuite sur du bois, d'où son gout inimitable. Mais le secret de la recette demeure, à ce jour, jalousement bien gardée par la famille Aksil, qui se refuse d'en révéler une «miette» à quiconque, à l'exception de sa belle-famille, Chenoune, qui a pu accéder, grâce aux liens de parenté tissés avec le temps, aux arcanes de cette recette centenaire, qui fait la joie des papilles de milliers d'adeptes de la zlabia de Boufarik. Chez la famille de Djelloul Chenoune, une très bonne adresse de la cité Beriane, réputée pour sa zlabia Boufarikoise authentique, la confection de ce gâteau est une affaire des femmes de la famille, soit l'épouse, les filles et les proches, dont l'«amour du métier est derrière le goût distingué de sa zlabia», soutient-il.