Protestation n L'opposition au président socialiste du Venezuela devait à nouveau manifester samedi, après que son leader a été déclaré inéligible pour 15 ans et écarté de fait pour l'élection de 2018, nouveau soubresaut de la crise politique qui ébranle ce pays. L'organisme public chargé de contrôler l'action des fonctionnaires vénézuéliens a imposé à Henrique Capriles, principal rival de Nicolas Maduro qui l'avait battu de peu lors de la présidentielle de 2013, "une sanction d'inéligibilité pour des mandats publics pour une période de 15 ans". La sanction répond à des "irrégularités administratives" durant la gestion de Capriles en tant que gouverneur de l'Etat de Miranda (nord), poste qu'il occupe actuellement, selon cet organisme. M. Capriles, âgé de 44 ans, a immédiatement répondu, lors d'une conférence de presse vendredi. "Ce n'est pas mon combat, mais celui de tous les Vénézuéliens ! (...) Nous allons défendre notre Constitution et notre pays ! (...) Le seul pour l'instant qui soit incapable de remplir son mandat dans ce pays c'est Nicolas Maduro", a-t-il rétorqué. "Si la dictature gémit, c'est que c'est peut-être bientôt notre tour, que nous avançons". Capriles, qui avait également été battu en 2012 par Hugo Chavez (décédé ensuite, entraînant de nouvelles élections en 2013), s'était déjà déclaré candidat aux primaires de la MUD pour la présidentielle de 2018. Jeudi, le chef de l'Etat avait fortement critiqué cette figure des antichavistes. Capriles "fait partie de l'histoire de la politique vénézuélienne. Il est fini politiquement", avait lancé le président Maduro, sans faire alors référence à de possibles sanctions contre le leader de l'opposition. Très impopulaire et soumis à une importante pression internationale, le chef de l'Etat, 54 ans, refuse d'organiser des élections anticipées comme l'exige l'opposition et entend rester au pouvoir jusqu'au prochain scrutin, prévu en décembre 2018. Le pays sud-américain, qui s'est effondré économiquement avec la chute des cours du pétrole, sa principale richesse, est déchiré par une profonde crise politique depuis la victoire de l'opposition de centre droit aux législatives de fin 2015. La situation s'est enflammée ces derniers jours quand la Cour suprême, réputée proche du président Maduro, s'est brièvement arrogée les pouvoirs du Parlement, déclenchant un tollé international qui l'a poussée à faire machine arrière 48 heures plus tard. L'opposition, réunie dans une vaste coalition, la MUD (Table pour l'unité démocratique), crie à la tentative de coup d'Etat et veut faire pression en mobilisant la population, étranglée par la crise économique. Hormis le Parlement, le chavisme contrôle toutes les institutions au Venezuela. Et depuis janvier 2016, la Cour suprême a réussi à faire annuler toutes les décisions du pouvoir législatif. Henrique Capriles a la possibilité de faire appel de son inéligibilité dans les 15 jours devant la "Contraloria", l'instance qui lui a infligé cette sanction, ou dans les six mois devant la Cour suprême. Mais l'opposition accuse ces deux organismes de servir le pouvoir. Une fois ces recours épuisés, M. Capriles devra abandonner son poste de gouverneur. R. I / Agences l Dans ce pays, l'un des plus violents au monde et où de vastes manifestations en 2014 avaient fait officiellement 43 morts, l'impasse politique fait craindre que la situation ne dégénère dans la rue. La manifestation de jeudi menée par les antichavistes (du nom de l'ancien président Hugo Chavez, 1999-2013) a mobilisé quelque 10 000 opposants qui ont défilé contre le pouvoir dans la capitale et à ses abords, et lors de laquelle plusieurs violentes échauffourées les ont opposés à la police. Un jeune homme de 19 ans a été tué, 19 personnes blessées et 30 autres interpellées.