Phénomène - La rentrée littéraire 2017 a vu la sortie de 180 romans dans les trois langues (arabe, amazighe et française), et la moitié sont les premières œuvres de leurs auteurs, un phénomène qui suscite des questionnements autour des éditeurs qui font la promotion de premières œuvres et sur la qualité de l'écriture. A ce sujet, certains auteurs estiment que cet engouement pour l'écriture est «positif». Amine Zaoui, qui a relevé que l'Algérie avec ses dix millions d'élèves, deux millions d'universitaires et un million de diplômés, souligne que le pays «a besoin de plus de 100 romans par an». M. Zaoui, qui s'est dit «très content de cette profusion de nouveaux livres», a manifesté, en dépit de son enthousiasme pour l'émergence de nouveaux auteurs, sa crainte pour certains de basculer dans le «suicide culturel», notamment en «l'absence d'un accompagnement critique» donnant lieu à un tri «rationnel» et «serein». Commentant cette vague d'écriture et d'édition, le romancier Mohamed Djaffer estime que «le sentiment ne produit pas de la littérature», relevant cependant «une certaine positivité» dans la publication d'un grand nombre de romans. Pour le romancier, «le problème ne réside pas dans le jeune créateur, mais dans l'absence de certains axes», avant de citer les éléments manquants chez l'éditeur, notamment «l'absence de rédacteur ou de réviseur», outre «l'absence» de presse spécialisée, la faiblesse des médias culturels, et la «domination» des réseaux sociaux qui ont «accordé un pouvoir au lecteur et l'ont transformé en auteur». Le critique et universitaire, Mohamed Amine Bahri évoque le «roman d'urgence» comme ce fut le cas dans les années 1990. Et d'ajouter que «l'obsession sécuritaire qui a engendré les 'textes légers' dans les années 1990, est devenue ‘une obsession sociale' et le souci majeur du jeune romancier immature est la publication». Mohamed El Amine Bahri explique que l'écriture chez certains amateurs n'est pas tant un objectif qu'elle est un moyen pour occuper une place au milieu de l'élite intellectuelle. Selon le critique et universitaire Lounis Benali, «en l'absence d'un mouvement critique, la vigilance s'impose face à la profusion de maisons d'édition et à l'émergence des nouveaux auteurs», estimant que «certains récits ne sont pas soumis au contrôle strict d'un comité de lecture», ce qui a donné lieu à des récits en manque de «spécificités du roman» en termes de langue, d'art et d'esthétique. Beaucoup d'écrivains payent la publication de leurs ouvrages, notamment les nouveaux auteurs qui tentent d'éditer leurs livres à n'importe quel prix. Si ce comportement est «contraire aux valeurs universelles de l'édition, il est cependant acceptable quand l'œuvre est éditée au compte de l'écrivain». Lounis Benali a notamment appelé les éditeurs à «régler les problèmes de distribution».