Création Le regretté Alloula avait tragiquement illustré de façon métaphorique la situation de ses compatriotes, les représentant en bêtes engagées dans un zoo. En artiste sensible à tout ce qui agresse les sens et l?affecte, il n?aurait pu s?empêcher de confier sa plume à un organe de presse algérien pour décrire ces appartements d?Alger, hier, d?apparence si quiète et accueillante transformés en bunkers pour personnes assiégées. Pour quelles raisons les Algériens se barricadent-ils ? Les prémices de l?angoisse commençaient à s?installer avec le souci de se doter d?abord de portes en fer pour ensuite se généraliser au barreaudage des fenêtres. Un climat de méfiance règne où chacun aura tendance à se barricader chez soi : «Dans les milieux traditionnels, la sécurité est assurée grâce à la solidarité du groupe. En se transposant dans les villes, ces rapports ont été brisés et il s?en est suivi une baisse de cette solidarité qui va entraîner de l?inquiétude individuelle». Psychologiquement, cela va se traduire par la recherche de la sécurité maximale, explique un psychologue. Le sentiment d?insécurité s?est généralisé et la méfiance vis-à-vis de l?autre traduit l?ampleur du sentiment d?angoisse. «Mon appartement ressemble à une prison. Il croule sous le poids des barreaux et malgré cela, je ne me sens pas en sécurité», assure un père de famille, rencontré à Belouizdad. Et d?ajouter : «Les vols d?appartements ont pris une proportion inquiétante ces dernières années. Je pense qu?il y a des bandes spécialisées dans ce genre de vols qui profitent généralement de l?absence des propriétaires pour accomplir leurs méfaits.» Son voisin de palier, célibataire, habite seul. Il raconte, avec dépit sa mésaventure. Son appartement a été quasiment vidé en une nuit, l?été dernier. Occupant un F4 au rez-de-chaussée, Belkacem a perdu la moitié de son mobilier. Depuis, il a quadrillé toutes les issues dans le but d?éviter une récidive. Il est vrai que ce qu?il a perdu lui a coûté «les yeux de la tête», comme il le dit lui-même. De nombreux citoyens, aux quatre coins du pays, ont vu également leurs appartements «visités». L?absence d?éclairage public, notamment dans les nouvelles agglomérations, est souvent une aubaine pour les bandes organisées et spécialisées dans le vol des maisons et des voitures.