Même si on fête le retour du printemps, l'hiver n'est pas pour autant fini. Il va même se rappeler au bon souvenir, et de la manière la plus forte, de ceux qui ont tendance à l'oublier : «Ma tamench rbie ula redjae, dit le proverbe, ma tamench chems ula cherqet» (ne croit pas le printemps qui revient, ne te fie pas au soleil qui brille) car, au moment où l'on s'y attend le moins, le ciel se couvre, la pluie tombe et le froid revient ! C'est à la fin du mois de furar du calendrier agraire (10-12 mars grégorien) que commence la période dite d?al h'ussum, mot arabe signifiant «froids piquants et vents violents». Selon une tradition, c'est à cette période que le peuple antique de 'Ad, dont parle le Coran, a été anéanti par Dieu, en punition de son impiété. En Kabylie, la période est appelée timgharin (les vieilles femmes), parce que, dit-on, elle est comme elles, dure et impitoyable. On rapporte aussi, pour justifier l'appellation, qu'une vieille femme, profitant d'une belle journée de printemps, est allée voir sa famille dans un village éloigné. Voilà qu'un retour brusque de l'hiver la surprend : pluie, neige et grêle tombent avec abondance, la bloquant pendant plusieurs jours. Elle jure alors de ne plus se laisser surprendre ! Une autre période de froid, qui succède à al h'ussum-timgharin est h'ayyan ou aheyyan, aheggan : Ie mot vient sans doute de l'arabe h?ayn et signifie «malheur». Dans certaines régions, on l'appelle an-natt'ah', le donneur de coups de corne, à cause des vents qui s'entrechoquent comme des béliers qui se battent. C'est le dernier retour de l?hiver et aussi le plus dur car, dit-on, il fait trembler même les sangliers des montagnes et les mangroves !