Représentation Le théâtre national a abrité, mercredi, la générale de Zbida Zeff, un one woman show de Rym Takoucht. Le monologue, écrit par Djamel Hamouda et mis en scène par Ahmed Khoudi, fait défiler le personnage (féminin) de Zbida Zeff incarné par Rym Takoucht. Il raconte une vieille femme de nature truculente. Elle parle sans arrêt. Elle passe son temps à tirer sur tout ce qui bouge n?épargnant rien ni personne. C?est une mégère, en fait. Un jour qu?elle parlait avec volubilité et sans laisser les autres placer un mot ou intervenir dans la discussion et même riposter à son discours souvent acerbe, Zbida Zeff à la suite d?un faux mouvement se coupe la langue. Transportée d?urgence à l?hôpital, les médecins parviennent à lui recoudre le bout de langue détaché, seulement ils l?ont fait étrangement : Zbida Zeff est sortie de l?hôpital avec une langue plus longue et plus acérée que jamais. Alors qu?elle habitait, seule dans un quatre-pièces, elle est sollicitée un jour par ses voisins qui, parce qu?ils sont à l?étroit, lui demandent, de leur concéder une pièce chacun. Comme elle est généreuse, elle accepte. Quelques petits travaux et voilà que son appartement se réduit à un couloir-toilettes qui sera, plus tard, squatté lors de son séjour à l?hôpital. Elle revient pour revendiquer la restitution de son appartement qui n?est autre qu?un patrimoine inaliénable. C?est donc dans un style loufoque que la vieille femme, Zbida Zeff, raconte avec minutie sa vie et décrit, sur un ton satirique et caricatural, la société. Elle se met avec beaucoup d?humour à disséquer la société à travers quatre personnages, dont chacun représente une frange de la société, avec ses défauts et ses inconduites. Elle décrit les comportements et les attitudes de la société algérienne, cupide, hypocrite et individualiste. Le texte recèle des potentialités certaines, tant au niveau du contenu qui a motivé son choix, que de la dramaturgie, c?est-à-dire la forme. «Quand on fait une ?uvre, il y a un sens, mais pas dans le sens de message», dira le metteur en scène, ajoutant que «la voie est ouverte à l?interprétation du contenu. Chacun est libre de lire à sa manière la pièce.» La lecture de la pièce se fait effectivement selon la sensibilité et la compréhension de chacun. Le monologue se veut une critique profonde de la société algérienne qui se trouve en perte de repères et qui cherche néanmoins, péniblement, à se reconstruire et à restituer sa mémoire. L?appartement est d?une grande symbolique : c?est un lieu de mémoire ; celle-ci appartient à Zbida Zeff. Le monologue est l?histoire d?appropriation et de réappropriation de la mémoire. Une lutte incessante entre le possesseur et l?usurpateur. Si le contenu est notable, il n?en demeure pas moins que le jeu reste moyen, ni mauvais ni bon, en dépit des efforts de la comédienne. Sur scène, Rym Takoucht s?est livrée à un jeu quasiment identique, sachant d?emblée qu?elle interprétait cinq personnages. Le passage d?une situation à une autre se déroule de façon linéaire, par moments plats, ce qui amoindrit la pièce de son esthétique, la ramenant sur le plan de la forme à une expression quelconque, et la faisant, en conséquence, choir dans la monotonie. L?effort de jouer est certes perceptible, mais il manquait ce souci de donner à chacun des personnages qu?elle a incarnés une personnalité et un caractère, voire une identité proéminente. Donner à chacun plus de couleurs et d?attitudes. Il reste néanmoins dans l?ensemble que l?effort mérite d?être encouragé. Produite par l'association Akkal du théâtre, avec le concours de l'Entv et du TNA, Zbida Zeff sera présentée en tournée à Tizi Ouzou, Constantine et Annaba. Elle sera rejouée, ce soir, à Alger, à 19h, ainsi que les 25 et 26 février.