Protection Du côté de Boumerdès, il y a un Algérien que l?Etat a armé pour veiller au repos et à la sécurité de ses compatriotes. Il était si bien armé qu?il a cherché une couverture qui s?appelle un officier supérieur de l?ANP pour s?en prendre à une vieille connaissance. Les faits ? Simples, clairs et très graves : pour des raisons obscures, l?inculpé a ordonné à un chauffeur de l?entreprise voisine de vergers et de merveilleuses plantations de raser ? et le verbe si expressif qu?il puisse être est loin de la vérité ? plus de cent vingt arbres fruitiers dont un vieil olivier, centenaire, un bassin d?irrigation et même un puits ! (Mesurez, l?étendue du crime contre la terre nourricière et généreuse !) Cet ex-gardien peu singulier et peu cavalier est un ancien chef de station. Il n?a gardé de la notion de chef que les vices, les défauts et la haine d?autrui. Il a osé faire dénuder une immense parcelle paradisiaque. «Mais pourquoi ce massacre ?», dit le juge plus que curieux du rôle joué par le chauffeur du bull. «Je me suis mis d?accord avec le colonel (excusez du peu) pour «aérer» le coin et éviter aux terroristes de s?y tapir», récite l?inculpé qui a été fermement rappelé à l?ordre par le président de l?audience correctionnelle pour avoir fait preuve de dépassements et en gesticulant se prenant pour un inculpé «privilégié qui a sous ses ordres un chauffeur». «Dites donc un peu, où est passé votre DG dûment convoqué à la barre ?», reproche le magistrat qui n?a pas avalé le moyen dilatoire pour ne pas se présenter à la barre. «Convoqué depuis trois semaines, votre DG a trouvé le moyen d?être en réunion un mardi et le jour du procès. Vous ne tenez pas votre boss par la barbichette, vous qui évoquez à tout bout de champ le colonel» ? Le tribunal est sûr que ce colonel n?existe que par votre orgueil, votre haine vis-à-vis des victimes dont vous aviez détruit les vergers, martèle le juge qui invite l?avocat de la partie civile à plaider la cause. Me Houcine Abaziz empruntera les «voies rapides» du droit. «Restons dans le domaine du droit», commence l?avocat qui flétrit l?acte du chef armé qui s?est comporté en «shérif» dans son «comté» pas d?une carrière qu?il se devait seulement de protéger. «Qu?il vous dise, croquis en main, quel est le lien entre la carrière et les arbres détruits pour que les terroristes puissent s?y cacher ?» Aucun. Car il y a une distance appréciable. Non. L?acte est délibéré. Il s?en est pris aux victimes qui réclament sept cent mille dinars chacune. «Regardez-les M. le président. Elles sont là debout mâchonnant les violations au nom de la sécurité de leurs terres par un bull conduit par un? robot car ce chauffeur n?avait pas à suivre l?inculpé sur un tel terrain», a ajouté Me Abaziz qui a rendu hommage au juge pour avoir condamné l?absence volontaire et inacceptable du DG de l?entreprise ! «Nous aurions su si ce colonel existait réellement car la défense est convaincue qu?il n?y a aucun officier pour avaliser un tel crime contre la nature», conclut l?avocat qui prend acte de la lourde peine requise par le procureur lequel n?a pas voulu admettre qu?un employé, même s?il est un chef d?une station carrière puisse ordonner la destruction de biens d?autrui. «Ce fameux colonel, c?est votre ego qui vous l?a épelé : voilà la vérité», conclut-il juste après qu?il eut requis deux ans fermes. Le dossier a été mis en examen.