Le jeudi 4 août 1988, aux environs de midi, une Peugeot 205 GTI de couleur rouge est volée sur le parking de C. C'est de cette manière banale que commence une des plus retentissantes affaires criminelles de ces dernières années. Elle va faire revivre une bien vieille forme de crime crapuleux, le banditisme de grand chemin, avec, pour cadre, la Nationale 7 et ses abords immédiats. Deux jours plus tard, le 6 août, à 3 heures du matin, la 205 rouge s'arrête devant un hôtel, en Saône-et-Loire. Trois hommes en surgissent et s'emparent du tiroir-caisse. Une semaine après, dans la nuit du samedi 13, à 1h 30, un touriste allemand, qui roule à bord d'une Austin sur la nationale 7 en direction de Villefranche-sur-Saône, remarque une 205 rouge qui le suit obstinément. Elle le double brusquement et l'oblige à s'arrêter. Trois hommes en sortent, brisent ses vitres, l'aspergent de gaz lacrymogène et repartent avec son argent. Une demi-heure plus tard, un hôtel est cambriolé à quelques kilomètres de là, par les mêmes individus à bord du même véhicule. Mais la nuit n'est pas finie ; le pire reste à venir. A 2h 40, Nadine une jeune femme de vingt-deux ans, qui rentre d'une soirée dans une discothèque, traverse le village de N. A un feu rouge, elle s'arrête derrière une 205 rouge. Le passager arrière se retourne et la dévisage. Nadine redémarre. La 205 se laisse doubler et se place dans son sillage. Nadine a beau accélérer, la 205 ne la lâche pas. Brusquement, alors qu'on traverse une zone industrielle, le véhicule rouge la double et lui fait une queue de poisson. Un homme armé et portant cagoule en descend. Il braque son arme sur sa nuque. ? Tais-toi et monte avec nous ou je te flingue ! Tandis que le gardien de nuit d'une banque, témoin de la scène, prévient la police, la 205 rouge démarre et s'arrête un peu plus loin, dans un terrain vague. Là, les trois hommes violent chacun plusieurs fois la jeune femme, puis disparaissent... C'est quatre jours plus tard, le 17 août, alors que tous les policiers de la région sont à ses trousses, que le trio à la 205 rouge va devenir meurtrier. Il est 0 h 15 quand la voiture arrive devant une buvette d'un petit village, à quelques kilomètres de la Nationale 7. Il s'agit d'un établissement en planches et cannisses, autour d'une camionnette qui sert de cuisine, comme il y en a tant à la belle saison. Il est tenu par les trois frères T. En raison de la température très douce, les consommateurs y sont encore nombreux. Soudain, les trois hommes jaillissent de la 205 rouge en tirant et en hurlant. Tout le monde se jette à terre. Le chauffeur, armé d'un fusil à pompe, reste près de la voiture, tandis que les deux autres s'avancent. L'un d'eux est un petit gros, l'autre est grand et athlétique. Ce dernier se dirige vers le comptoir, où se trouvent deux des frères T. Il ordonne : Je veux la caisse, le fric ! Dépêchez-vous ! Il frappe à coups de pied et de crosse le plus proche, André T., tandis que l'autre frère, Antoine, reste pétrifié derrière le comptoir. André s'exécute et remet au bandit une sacoche contenant 1 500 francs. C'est alors que le troisième frère, Bernard, trente-trois ans, qui se trouvait un peu plus loin, tente d'intervenir. L'homme se tourne dans sa direction et, sans hésitation, tire sur lui presque à bout portant. Touché à la poitrine, Bernard est tué sur le coup. Faisant preuve du plus grand sang-froid, les deux agresseurs prennent le soin de ramasser les douilles des balles qu'ils ont tirées, de crever les pneus des voitures stationnées devant la buvette, puis remontent dans la 205 rouge qui disparaît. La tragique équipée de ce 17 août 1988 n'est pourtant pas terminée. Un quart d'heure plus tard, à 0h30, la 205 rouge arrive dans une station-service. (à suivre...)