Irresponsabilité Entouré de trois ou quatre personnes, un chauffeur d?une trentaine d?années, une cigarette entre les doigts, est devant une tasse de café pour laquelle il a même prévu un support en métal. «Ce cascadeur» roule à vive allure, essayant de dépasser les autres bus, afin d?arriver le premier au prochain arrêt et ainsi«rafler» les passagers qui s?y trouvent. Cela n?empêche nullement le «champion du rallye» de poursuivre les débats avec ses interlocuteurs. Cette fois, il s?agit des exploits de l?équipe nationale face au Rwanda. Le chauffard n?hésite pas à «taper cinq» avec les personnes qui l?entourent, à les regarder en face un bon moment tout en conduisant. Quelques instants plus tard, le receveur les rejoint et c?est la fête ! Des fous rires, des cris, des hurlements emplissent alors le bus. Les voyageurs, qui assistent impuissants à cette anarchie, ne font que commenter. «Ce sont des pratiques courantes et gare à celui qui osera perturber leur quiétude. Ils peuvent être très violents avec lui, verbalement et même physiquement», dit un passager. La loi est pourtant très claire là dessus. Une plaque, à l?avant du bus, indique bien qu'il est strictement interdit de parler au conducteur. Le législateur algérien, de son côté, n?a rien épargné dans ce domaine. L?article 6 des règles générales de la circulation routière stipule que «tout conducteur de véhicule doit se tenir constamment en état et en position d?exécuter, commodément et sans délai, toutes les man?uvres qui lui incombent. Ses mouvements et son champ de vision ne doivent pas être réduits par le nombre ou la position des voyageurs ou par l?apposition d?objets non transparents sur les vitres». En plus, de nouvelles mesures ont été arrêtées afin de sécuriser les usagers de la route. Elles stipulent que l?âge minimum d?un chauffeur de bus est désormais de 25 au lieu de 20 ans. Une interdiction est faite, par ailleurs, aux transporteurs publics d?utiliser la voie de gauche. S?ajoute à cela la convention signée avec le ministère de la Formation professionnelle pour la formation des conducteurs. Mais selon beaucoup de voyageurs, ces décisions semblent dérisoires devant la gravité de la situation. «Le tragique accident qui a coûté la vie à une dizaine de voyageurs, en 2003, à Bologhine, où un bus avait chuté dans la mer et dans lequel l?erreur humaine s?est avérée la cause principale, n?a apparemment pas servi d?exemple pour faire cesser ces cascades fatales», regrette un sexagénaire.