Samia avait trois ans quand Djamel, son frère aîné, passait des nuits blanches pour préparer son bac Lettres. Elle en avait douze lorsque sa s?ur Soumia prenait café sur café pour rester éveillée à mesure que l?épreuve du bac avançait. Le bac chez cette famille studieuse revient cette année pour mettre la gamine de 17 ans au devant de la scène. Le bac ce n?est plus une épreuve, c?est un virage à ne pas manquer, et pour cela toute la famille doit fonctionner à plein régime pour une réussite totale. On ne badine pas avec des règles qui ont ramené jusque-là deux bacs avec en prime une mention. Jamais deux sans trois ? Quand cet examen, aussi prisé par les riches que par les pauvres, est devenu, au fil des années, une histoire de famille, mais surtout une histoire de «nif», le père, la mère, les frères et les s?urs se mettent de la partie pour accompagner la charmante Samia vers les cimes. Son père lui a promis qu?elle passerait le permis de conduire. Son frère, ingénieur dans une société chinoise de télécommunications installée à Alger, lui a promis un somptueux cadeau si les Chinois l?envoyait en stage de perfectionnement pour quelques mois au pays du Soleil levant. Sa mère, elle, l?asperge de louanges à chacune de ses prières. A tout seigneur tout honneur, et à quelques encablures seulement du fatidique 11 juin, Samia ne fait ni lessive, ni vaisselle, ni parterre. Comme un footballeur en stage bloqué à la veille d?une rencontre capitale, elle n?a d?yeux que pour le bac. «Nous ne voulons pas l?occuper par autre chose. Elle a des tonnes de feuilles qu?elle doit passer au peigne fin. Elle est un peu agacée et on ne risque rien avec elle. Elle veut réussir et nous faisons tout ce que nous pouvons pour l?aider à passer la dure épreuve», a avoué sa mère qui accepte, pour l?avenir de sa fille, de faire des efforts à la cuisine. «Pour ma fille, maâlich?»