Protestation «Aujourd?hui, les pizzerias poussent comme des champignons ! Personne ne respecte la réglementation !», s?indigne Rabah. Ce patron d?une pizzeria à Alger ajoute : «Un salon de thé vient d?ouvrir juste à côté, le propriétaire n?a même pas respecté la distance requise, au moins 100 mètres ! Il m?a volé tous mes clients !» L?orateur met ses mains dans les poches de son tablier blanc puis enchaîne : «Ce n?est pas facile d?exercer dans ce climat de concurrence déloyale. Les pizzerias et les salons de thé surgissent partout. La loi n?est plus appliquée comme il se doit. Alger n?est plus que pizzerias et cafés !» Il se tait un moment et sert une cliente qui vient de rentrer. La quarantaine, Rabah en paraît moins. Point de rides sur sa frimousse ovale, quelques cheveux grisonnant seulement. Sa jovialité, ses anecdotes et sa façon de parler le font apparaître plus jeune encore. «J?accueille mes clients avec le sourire ! La bonne parole est importante !» Rabah propose une variété de pizzas, de sandwichs tunisiens et américains... Des plats de frites et de viandes et des salades. Sur la vitrine de sa boutique, des pancartes sont accrochées, écrites maladroitement au feutre, elles proposent le menu. L?endroit est étroit, mais cela ne le gêne guère. «Ces affiches attirent les clients ! et puis, sincèrement, je n?ai jamais pensé changer le menu. Les gens mangent et aucun client n?a jamais rouspété à ce jour», confie-t-il en haussant les épaules. Un peu plus loin, dans un autre restaurant où des plats traditionnels sont proposés et où l?on sert même le méchoui, le serveur est catégorique : «Le menu ne change jamais. C?est ce que les clients aiment manger. Pourquoi le changer alors !» La question lui semble ridicule. Le patron confirme ses dires : «Pourquoi voulez-vous que je m?investisse sans aucune assurance de réussite ? ! Pourquoi proposer des plats qui seront, peut-être, repoussés par mes clients !? Les Algériens adorent les patates et les ?ufs au plat !» Presque la même réponse revient sur toutes les bouches des serveurs et des patrons interrogés. Les rares restaurateurs qui se démarquent proposent un menu certes varié, mais quotidien, qui ne change presque jamais : riz, tajine zitoune, poulet, purée, ch?titha l?ham. C?est tout. Souvent, l?on oblige le client à consommer au moins un plat de viande pour arrondir l?addition ! Dans les boulangeries et les pâtisseries mêmes gâteaux, plats et mêmes salés. La même préparation. Ce qui indique clairement que le secteur connaît une stagnation profonde. Point de création, de génie, de changement. Où l?on va, on mange les mêmes plats, les mêmes gâteaux? On dirait qu'une seule main les a préparés. Seuls les tarifs changent.