Résumé de la 23e partie n Sindbad apprend par son voisin que ce dernier allait être enterré vivant avec son épouse qui venait de décéder. C?était la coutume dans cette contrée. Sindbad continua son histoire : «Dans le temps qu'il m'entretenait de cette étrange barbarie, dont la nouvelle m'effraya cruellement, les parents, les amis et les voisins arrivèrent en corps pour assister aux funérailles. On revêtit le cadavre de la femme de ses habits les plus riches, comme au jour de ses noces, et on la para de tous ses joyaux. On l'enleva ensuite dans une bière découverte et le convoi se mit en marche. Le mari était à la tête du deuil et suivait le corps de sa femme. On prit le chemin d'une haute montagne, et lorsqu'on y fut arrivé, on leva une grosse pierre qui couvrait l'ouverture d'un puits profond, et l'on y descendit le cadavre, sans lui rien ôter de ses habillements et de ses joyaux. Après cela, le mari embrassa ses parents et ses amis et se laissa mettre dans une bière sans résistance, avec un pot d'eau et sept petits pains auprès de lui. Puis on le descendit de la même manière qu'on avait descendu sa femme. La montagne s'étendait en longueur et servait de bornes à la mer et le puits était très profond. La cérémonie achevée, on remit la pierre sur l'ouverture. «Il n'est pas besoin, messeigneurs, de vous dire que je fus un fort triste témoin de ces funérailles. Toutes les autres personnes qui y assistèrent n'en parurent presque pas touchées, par l'habitude de voir souvent la même chose. Je ne pus m'empêcher de dire au roi ce que je pensais là-dessus. "Sire, lui dis-je, je ne saurais assez m'étonner de l'étrange coutume qu'on a dans vos états d'enterrer les vivants avec les morts. J'ai bien voyagé, j'ai fréquenté des gens d'une infinité de nations, et je n'ai jamais entendu parler d'une loi si cruelle. ? Que veux-tu, Sindbad ? me répondit le roi. C'est une loi commune, et j'y suis soumis moi-même : je serai enterré vivant avec la reine mon épouse, si elle meurt la première. ? Mais, Sire, lui dis-je, oserais-je demander à Votre Majesté si les étrangers sont obligés d'observer cette coutume ? ? Sans doute, repartit le roi, en souriant du motif de ma question, ils n'en sont pas exceptés lorsqu'ils sont mariés dans cette île." «Je m'en retournai tristement au logis avec cette réponse. La crainte que ma femme ne mourût la première et qu'on ne m'enterrât tout vivant avec elle me faisait faire des réflexions très mortifiantes. Cependant, quel remède apporter à ce mal ? Il fallut prendre patience et m'en remettre à la volonté de Dieu. Néanmoins, je tremblais à la moindre indisposition que je voyais à ma femme ; mais, hélas ! j'eus bientôt la frayeur tout entière. Elle tomba véritablement malade et mourut en peu de jours.» (à suivre...)