Balade n Le transport est à la portée de toutes les bourses : fourgons, clandestins, «taxieurs». 50 DA la place. Une virée à Chréa équivaut à un pèlerinage au c?ur de la nature. Les lumières douces et les différents tons de vert éblouissent. Tout repose la vue, rien ne fatigue, rien n?irrite l?esprit. Au contraire, la beauté de la nature, conjuguée à la chaleur des habitants, procure un sentiment de bien-être. Elle procure du plaisir à tous sans exception. Toutes les catégories sociales ? riches, pauvres ? hommes ou femmes, y trouvent leur compte, dès lors qu?ils décident de goûter à ses joies. Si, pour beaucoup, Chréa est un immense parc, pour d?autres, c?est une galerie à visiter avec beaucoup de recueillement. Les tableaux défilent lentement sous le regard curieux du visiteur. Les sculptures que sont les troncs d?arbre évoquent, sans détour, le génie de la nature. Voltaire disait : «C?est un grand art que celui de rendre les hommes heureux pendant deux heures.» Dans le cas de Chréa, le bonheur est de plus longue durée. La beauté, certes, réside dans le détail, mais ici, elle l?est dans l?ensemble que constitue cette région. Charge à l?esprit du visiteur d?en façonner les contours. La genèse de cette beauté se feuillette tel un livre. Chréa incite à la réflexion, mais aussi aux rêves les plus fous. L?endroit les y autorise. Indétronable, l?amour s?approprie tout l?être. Les endroits retirés suggèrent des rencontres inédites. Le feuillage dense offre une intimité royale. Le chauffeur appuie sur le champignon, le moteur vomit toute sa rage et entreprend sa lutte contre la pente raide ou plutôt la montagne. Le chauffeur entame la discussion : «Vous allez voir de la famille ?» ?«Voir une amie !», ai-je répondu. Chréa ne mérite-t-elle pas cette appellation ? Les virages sont en épingle à cheveu, la pente raide, le moteur de la vieille voiture est dans tous ses états. Dehors, les sapins et autres arbres défilent, Blida est reléguée au passé, l?avenir appartient à Chréa. A gauche et à droite, la verdure invite le visiteur à la détente. La route étroite, les branches entremêlées des arbres forment un tunnel sans fin. Par endroits, la lumière perce ce feuillage dense et verse des flots de rayons clairs, sur fond vert. Impossible d?échapper à un faux barrage dans ces lieux. «La sécurité est rétablie depuis longtemps», dira le chauffeur rassurant. «Les militaires sont partout. Ils sont embusqués derrière les arbres», explique-t-il. Et pour effacer toute crainte, il ajoute : «Je traverse plusieurs fois par jour ce chemin. Parfois à 3h.» Sur la placette de Chréa, on se croirait dans un village de Kabylie. C?est un îlot au milieu d?une mer de verdure. La forêt est à perte de vue. Les chalets émergent tels des icebergs, çà et là, dotés de vues imprenables. Le siège de l?APC, à droite, la poste à gauche ; au milieu un monument indescriptible jeté là, au hasard. Quelques jeunes s?attablent à la terrasse du café Terminus. Il est midi, la chaleur est absorbée par la grande quantité d?oxygène. «Il y a beaucoup de gens qui viennent ici, notamment les week-ends», explique Nassim, employé au café. A gauche, la rue de la Liberté invite les visiteurs à une balade. Ce nom est très évocateur. Quelle liberté, économique, sociale, politique ? Les lieux permettent en tout cas celle de l?esprit ! Les cèdres de l?Atlas pullulent dans cet endroit formant un toit de branchage, les amoureux y trouveront matière à discussion. De chaque côté de la rue, des cabanons se construisent indiquant le grand retour de la population. De multiples petites ruelles ou plutôt des pistes achèvent la rue de la Liberté, menant au c?ur de la forêt. Plusieurs couples s?y égarent, pas toujours involontairement. L?endroit offre plusieurs tables avec bancs pour les familles qui veulent déjeuner sous un immense arbre.