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SOS Chréa en détresse !
La pollution met en péril ce poumon de l'Algérois
Publié dans La Tribune le 03 - 06 - 2009


Photo : Sahel
Par Abderrahmane Semmar
Telle une tour qui aspire à toucher le ciel, Chréa impose à l'horizon sa majestueuse envergure. Ni les nuages épais ni le bleu azuré du ciel n'arrivent à éclipser les couleurs verdoyantes de cette montagne à la silhouette sublime. Ses versants dessinés par des forêts de cèdres, de pins noirs, de chênes verts et de pins d'Alep dévoilent aux visiteurs une toile chatoyante que le grand peintre de l'univers a croquée dans un éclat de génie. Grâce à ses massifs boisés, ses clairières de cédraies, son col de châtaignier, un paysage à faire rêver les poètes émerge de la montagne de Chréa. Sur une route qui serpente la montagne magique jusqu'à son pic, lequel s'élève à 1 625 m, l'œil du visiteur domine l'opulente plainte de la Mitidja, avec ses carrés champêtres, et découvre l'arrière de la frange montagneuse constituée par le djebel Chenoua à l'ouest, le bourrelet du Sahel qui porte sur ses hauteurs centrales le Tombeau royal mauritanien (tombeau de la Chrétienne) et les monts de Bouzaréah à l'est autour desquels on aperçoit, non sans avoir le souffle coupé, la conurbation occidentale du Grand Alger.
En cheminant encore sur le serpent de bitume pour arriver au pic Koudiat Sidi Abdelkader, le point le plus élevé de la montagne, le panorama du grand large de la mer Méditerranée vient en arrière-plan pour subjuguer les yeux et faire tourner la tête en offrant à la contemplation le mouvement dans toutes les directions du trafic maritime. Vers le sud, le regard est captivé par la vue plongeante qui nous fait découvrir au premier plan l'anticlinal sauvage de Takitount, lequel renferme une biomasse végétale très dense. Dominé par le plateau de Médéa, il prolonge la vue jusqu'aux hautes plaines du Titteri et, vers l'ouest, les reliefs montagneux de la terminaison orientale de l'Ouarsenis où l'on remarque une suite enchevêtrée de pics montagneux des monts du Dahra et, enfin, vers l'est, le visiteur ébahi, découvre les hauteurs de la chaîne kabyle dominée au premier plan par la présence imposante du massif du Djurdjura.
Outre ces vues magiques, des sentiers insoupçonnés permettent aux visiteurs de sillonner les grands espaces verts constitués essentiellement de cèdres, de sapins, de chênes-lièges. Des sites panoramiques accueillant des milliers de visiteurs, chaque année, hiver comme été. En effet, la station climatique draine beaucoup de visiteurs durant les vacances d'été. Des amoureux qui préfèrent se rendre dans les montagnes et les hauteurs tout en cherchant un bon bol d'air, frais, apaisant mais aussi naturel puisé dans les intarissables sources d'eau du Parc national de Chréa. Ainsi, depuis que le calme est revenu dans la vallée de Chréa, le lieu suscite de plus en plus un engouement considérable de personnes, surtout les asthmatiques venant dans le but de trouver un remède naturel à leur maladie, en prenant de l'air pur et frais tout en se rafraîchissant aussi de sa brise. Quant aux promeneurs et aux randonneurs, un régal les attend au détour d'un virage, d'une clairière. Au bout de quelques lieues parcourues allègrement, une escalade enrobée d'un environnement verdoyant à perte de vue, aux senteurs florales généreuses, révèle les visiteurs à eux-mêmes et à la beauté authentique de la vie.
L'ombre au tableau
Mais, attention, il y a une ombre à ce tableau idyllique. Une ombre qui obscurcit de jour en jour Chréa l'enchanteresse. Et pour cause, depuis l'installation du téléphérique de Chréa, long de pas moins de 20 km, chaque heure plus de 900 personnes viennent, notamment les week-ends, oublier les soucis et le stress de leur routine urbaine dans les cinq aires de repos aménagées dans le parc de Chréa. Des citoyens qui,
malheureusement, ne font guère dans l'écotourisme car en repartant, le constat sur place est plus qu'amer-ils laissent derrière eux ordures, immondices, détritus et déchets. Les vastes forêts émeraude se transforment, le temps d'un week-end, en un dépotoir à ciel ouvert !
Que ce soit au col des Fougères, aux Châtaigniers, à Beni Ali et dans toutes les autres aires de repos, un spectacle hideux, témoignant de l'incivisme des visiteurs, s'offre aux regards. Des tables de bois arrachées, des bacs à ordures détruites, des sacs-poubelle jonchent le sol et même les arbres sont écorchés par des couteaux.
La dévastation n'épargne guère les espaces forestiers les plus reculés car la main sauvage de l'homme y a introduit des souillures que nul amoureux de la nature ne peut tolérer. Des décharges sauvages ont vu le jour sur les flancs de la montagne qui, naguère, fut un modèle et une source d'inspiration pour les écologistes. Des décharges qui contiennent un fatras hétéroclite d'ordures allant de simples sacs-poubelle jusqu'aux déchets de construction que des irresponsables viennent déposer, là, dans la vallée de Chréa, réserve naturelle et poumon
de l'Algérois.
Cette pollution massive menace aujourd'hui plus que jamais le devenir de ce parc qui compte comme trésor pas moins de 71 espèces protégées. S'étendant en écharpe sur 26 587 ha le long des parties centrales de la chaîne de l'Atlas tellien, le Parc national de Chréa est, pourtant, un établissement public à caractère administratif créé, en 1983, par le décret n° 83-461 du 23/07/1983. Présentant une richesse floristique très diversifiée à travers ses étages bioclimatiques inégalement réparties sur l'ensemble du territoire, ce parc regorge de 794 taxons de rang d'espèces et sous-espèces. Ce qui représente 23% de la richesse floristique nationale.
722 de ses espèces sont des végétaux supérieurs se répartissant sur 88 familles et 333 genres, le reste représente la flore mycologique. Par ailleurs, la flore du parc compte des espèces rares, protégées, des espèces endémiques et celles inscrites sur la liste rouge des espèces menacées. On recense aussi 176 espèces de flore médicinale aux vertus phytopharmaceutiques telles que l'ortie, la verveine, la nigelle, la lavande, l'origan, etc. Ces taxons de la flore médicinale sont indicateurs de l'importance et de la valeur du patrimoine floristique du parc. On y trouve, également, les remarquables orchidées. Ces plantes ornementales particulières comptent 8 d'entre-elles dans la liste nationale des espèces protégées. Le genre le plus représenté est ophrys et le genre orchis. Elles se distinguent des autres plantes par leur originalité florale. Leur disparition est, malheureusement, un indicateur de pollution.
Une pollution qui inquiète beaucoup les responsables du Parc national de Chréa. Ces derniers tirent la sonnette d'alarme et appellent en urgence à une prise de conscience nationale pour garantir la protection de ce joyau naturel. Dépourvus de moyens appropriés et d'effectifs adéquats, les protecteurs de Chréa assistent, angoissés et impuissants, à la montée en puissance des comportements inciviques. «Nous ramassons après chaque week-end plus de deux tonnes et demie d'ordures. C'est une quantité considérable.
Une quantité qui ne cesse d'augmenter au fur et à mesure de l'accroissement du taux de fréquentation du parc», confie le directeur du Parc national de Chréa, M. Dahal, reconnaissant au passage, sans aucun faux-fuyant, que «si cela continue, la grande zone d'eau et les zones d'alimentation phréatiques risquent d'être infiltrées par les composantes des produits plastiques jetés à tort et à travers dans le parc». C'est dire, que le danger est imminent d'autant plus que le secteur de Chréa, le premier des trois autres secteurs du parc (Hamdania et Hammam Melouane), ne dispose que de huit agents pour procéder au nettoyage des sites forestiers. 8 agents face à près de 16 000 véhicules qui parviennent de tout le centre du pays pour un week-end dans cet immense et féerique musée à ciel ouvert ! «Nous sommes face à un problème de société : le déficit du comportement des citoyens. De plus, nous sommes otages de la situation géographique du parc. Chréa est le seul parc situé dans une région peuplée de 8 millions d'habitants. Nous ne pouvons pas refuser l'accès à ces habitants en quête de détente et de repos. En l'absence de jardins et d'espaces verts dans les villes de la région, les habitants se rabattent sur notre parc. Aujourd'hui, les sites de Chréa subissent annuellement la pression de plus de deux millions et demi de visiteurs. C'est trop pour le parc. Il faut réactiver les espaces verts et les jardins dans les villes. Cela permettra de capter un flux des visiteurs et de diminuer la pression sur Chréa», souligne encore M. Dahal qui appelle les pouvoirs publics à se pencher sérieusement sur ce dossier.
La menace du feu
A défaut, l'espace fragile de la réserve naturelle de Chréa risque de périr. C'est, donc, un véritable SOS que la vallée lance à tous les Algériens désireux de la sauvegarder et de la protéger contre les prédations. Elle qui a déjà souffert des feux de forêt, lesquels ont ravagé, en août 2007, plus de 1 700 ha, craint pour sa survie avec la forte affluence estivale enregistrée d'ores et déjà dans ses multiples sites. «En quelques semaines, nous avons perdu plus de 200 tables de bois. Des gens les arrachent ou les brûlent pour les besoins de leurs barbecues. Les bacs à ordures, les chaises, les troncs d'arbre, tout est saccagé et volé par des visiteurs inconscients et manquant gravement d'éducation. Comment voulez-vous qu'on protège la nature avec ces gens-là ? Lorsqu'on essaie de les sensibiliser, ils se comportent envers nous avec beaucoup de mépris. Croyez-moi, si nous n'avions pas fourni des efforts, Chréa serait devenue une montagne de déchets», explique de son côté, M. Ziar, responsable du secteur de Chréa. Dans ce contexte, notre interlocuteur appréhende beaucoup la chaleur de cet été qui, conjuguée à l'inconscience des estivants de plus en plus nombreux à fréquenter Chréa, risque de provoquer de terribles incendies. De son côté, M. Dahal ne minimise pas le risque. «On s'attend à un été très difficile car la couverture végétale, avec la bonne pluviométrie de cette année, a repris dans plusieurs sites. On a débroussaillé les pistes des forêts et on a établi une ceinture pare-feu de 40 km. Mais, le manque de vigilance et la mégarde des visiteurs risquent de nous coûter très cher», assure-t-il.
La peur du danger est perceptible, également, sur les visages des résidants de la petite localité de Chréa. La pollution, le feu, la dégradation des espaces verts reviennent tel un leitmotiv dans les discussions des habitants de la région. Naguère, ils étaient au moins 4 000 à vivre dans la zone périphérique du parc. Aujourd'hui, ils ne dépassent guère les 500. La morosité qui règne dans la place principale de la commune de Chréa témoigne à elle seule de la désaffection des lieux. Un restaurant, une poste, un secteur sanitaire, un hôtel, une école primaire et quelques dizaines de chalets appartenant à des particuliers, voilà de quoi se compose la petite localité. Mis à part le téléphérique, aucun moyen de transport n'existe à l'exception des clandestins occasionnels. Si certains chalets sont repris en main par leurs propriétaires, restaurés et agrandis, d'autres tombent en décrépitude. Certains gardent les séquelles du terrorisme quand ils ont été brûlés et vandalisés. «Chréa est un bijou sans joaillier. Ses atouts ne sont pas exploités. Et les gens qui la protègent sont démissionnaires», révèle Redouane, un jeune cuisinier à l'auberge les Roses de la neige, un superbe chalet qui nous renvoie au décor des Alpes suisses. «Nous n'avons ni eau potable ni gaz de ville. C'est nous qui avons installé l'éclairage et nettoyé les espaces environnants. Mais, ici, les autorités se contrefichent du sort de Chréa. Nous les avons interpellés à maintes reprises, en vain. Les gens viennent polluer en toute impunité. Avec le temps, ce paradis deviendra un refuge pour les dépravés», conclut ce natif de Chréa.
Impossible de ne pas penser à la légende de Gabriel Gely en entendant une telle profession.
Revenu «gazé» de la guerre 14-18, cet amoureux de la nature originaire de Blida décida lors d'un été caniculaire d'aller faire à Chréa une cure d'air pur en altitude.
La légende raconte qu'installé sous sa tente, face au sud ensoleillé, il regardait journellement passer les fellahs qui, de leurs villages : Kerrache, Guergour, Takitount, descendaient avec leurs ânes surchargés vendre le produit de leur récolte et de leur travail au marché de Blida : pommes de terre, fèves, oignons, ails, figues, grenades, abricots, cerises, noix, amandes, jujubes, arbouses et charbon de bois. De temps en temps, Gely recevait la visite de Giordano, l'un de ses amis mais aussi de chasseurs qui grimpaient jusqu'à la magnifique forêt de cèdres des Beni-Mesrah et des Beni-Salah pour traquer le sanglier, le perdreau ou même la bécasse. Avec le temps, l'ami Gely prit l'habitude de préparer chaque dimanche la tambouille pour tout le monde. A cette époque, la route carrossable arrivait tout juste aux «Glacières» : des trous, sortes de silos, où était conservée pour l'été, la neige de l'hiver protégée par la paille.
Peu à peu, les chasseurs vinrent accompagnés de leurs femmes et de leurs enfants et les affaires de Gely s'améliorèrent. Avec un petit matériel de maçon comprenant un moule à parpaing, il édifia, en bordure du col, une petite bâtisse : c'était la naissance de ce qui allait devenir le «Grand Hôtel des Cèdres». Vers la fin des années 20, sous l'impulsion du docteur Granger, célèbre oto-rhino-laryngologiste, les sports d'hiver prirent leur essor. Un premier chalet refuge abrita les membres du Ski club algérien en bordure de ce que l'on appela plus tard la «grande piste». C'est ainsi que naquit la légende de Chréa. Une légende ternie par la pollution et les dégradations quotidiennes de la vallée. Mais, de l'aventure ou du rêve de Gely à la désillusion ou au cauchemar du jeune Redouane, de nombreuses leçons restent à tirer. Une chose est sûre : le Parc de Chréa mérite un meilleur sort. Mais cela préoccupe-t-il quelqu'un dans notre pays ?


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