Difficultés n Alors que les discussions d?adhésion de la Turquie s?ouvrent aujourd?hui, les Européens peinent à s?entendre sur la finalité de l?exercice. Le dossier turc a pris une dimension considérable dans les débats politiques des pays membres de l?Union, et la question de l?entrée d?Ankara dans l?UE se révèle aujourd?hui beaucoup moins technique et bien plus passionnelle qu?auparavant, donc plus complexe que prévu. Les réticences qui, autrefois, affectaient certains secteurs marginaux des opinions publiques, s?inscrivent aujourd?hui ouvertement dans les campagnes électorales nationales, comme en Allemagne dernièrement, et sont relayées jusqu?à la table des négociations bruxelloise. Au stade actuel des débats, la question de la finalité des tractations n?est toujours pas formellement définie. Tandis que pour la plupart des pays, la Turquie en tête, il s?agit de négociations d?adhésion, à Vienne (tout comme Angela Merkel à Berlin ou Nicolas Sarkozy à Paris), on souhaite introduire une référence explicite à l?éventualité d?aboutir à un «partenariat privilégié» plutôt qu?à une adhésion formelle. Cette hypothèse est catégoriquement écartée par Ankara, qui menace de cesser toute discussion le cas échéant. La présidence britannique de l?UE souhaite convaincre les Autrichiens de négocier l?adhésion et rien d?autre, dans le cadre d?un processus ouvert et sans garantie toutefois d?aboutir. Selon une source diplomatique, «l?Autriche est relativement isolée». Les 25 auraient également renforcé dans la mandat de négociation la notion de «capacité d?absorption» de la Turquie par l?UE. Selon certaines sources, les Etats membres auraient notamment approuvé une proposition française de renforcer ce point, en précisant que cette capacité doit être appréciée aux niveaux institutionnel, financier, judiciaire et des affaires intérieures. Enfin, il semble que la difficulté suscitée fin juillet par la mise au point d?Ankara sur la République de Chypre ait pu être résolue à l?issue de la réunion de Bruxelles. Après quelques jours de valse-hésitation, de déclarations et contre-déclarations, les 25 devaient entériner la dernière version d?un texte soulignant la nécessité pour un futur Etat membre de reconnaître tous les autres, sans exclusive, et qu?il s?agit là d?«une composante nécessaire du processus d?accession». En clair, Ankara dispose du délai offert par les négociations d?adhésion (10 ans, 15 ans ?) pour satisfaire la demande européenne. Le 29 juillet, dans son protocole d?extension de l?union douanière aux dix nouveaux membres de l?UE, Ankara avait joint un texte indiquant que son engagement ne valait pas reconnaissance de la République de Chypre, provoquant l?embarras de l?Union européenne. Selon les dernières moutures du texte, l?Union va accorder une vigilance particulière à l?application par Ankara de cette union douanière, qui doit se traduire par la libre-circulation des marchandises entre Nicosie et Ankara. Jack Straw «pas certain» d'un accord l Le chef de la diplomatie britannique Jack Straw a affirmé, ce matin à Luxembourg, qu'il n'était «pas certain» d'arracher l'accord européen indispensable pour ouvrir dans la journée les négociations d'adhésion de la Turquie à l'UE. La «turcophobie» gagne du terrain l De tous les pays susceptibles d'adhérer un jour à l'UE, la Turquie est celui qui suscite le plus d'hostilité chez les citoyens des Vingt-Cinq : 52% d'avis négatifs selon le dernier «eurobaromètre» publié par Bruxelles. La «turcophobie», en forte hausse, atteint ses plus hauts scores en Autriche (80% contre l'adhésion, 10% pour), en Allemagne (74% contre, 21% pour) et en France (70% contre, 21% pour). A l'inverse, une majorité de Polonais, de Suédois ou de Hongrois soutient cet élargissement.