La nouveauté, qui reste à préciser davantage ? les directeurs d?école contactés par nos soins, ont affiché leur ignorance ? réside dans la généralisation progressive des classes préparatoires. Elles sont hébergées dans l?enceinte des écoles primaires et accueillent les enfants âgés de cinq ans. Elles sont l?équivalent des grandes sections de la maternelle. Cependant, bien des obstacles se dressent devant cette volonté d?asseoir une véritable politique du préscolaire. Une carence dans la prise en charge de cette tranche d?âge risque d?hypothéquer l?objectif premier assigné à ces classes préparatoires. De par sa spécificité, la pédagogie du préscolaire n?a rien à partager avec celle de l?école primaire, excepté la rigueur dans la gestion du temps et des activités et la bonne connaissance du profil psychologique de ses élèves par l?éducatrice. Dans le préscolaire, c?est le jeu et les jouets qui constituent l?épine dorsale de l?emploi du temps des enfants. Avec, bien sûr, l?action permanente qui vise au développement du langage. On n?y parle pas d?initiation aux apprentissages de base (lecture, écriture et calcul), mais de préparation. C?est là le risque majeur encouru : confondre initiation et préparation. En théorie, les éducatrices du préscolaire sont spécialement formées pour déjouer ce risque et appliquer les principes fondamentaux de la pédagogie du préscolaire. En réalité, le MEN ne possède pas de plan de formation dans ce domaine. L?un des obstacles qu?affrontent les classes préparatoires ouvertes dans les écoles publiques se situe au niveau de l?encadrement. Ce sont des enseignants, habitués à enseigner dans le primaire, qui sont chargés de ces classes. Qualifiées et formées pour dispenser des cours d?initiation en lecture, écriture et calcul, ces «éducatrices de préscolaire» (en fait des institutrices) n?ont pas reçu le recyclage approprié. Parfois, ce sont des enseignantes en sureffectif, des novices sans formation pédagogique, qui sont désignées. L?organisation pédagogique qui prévaut au sein de ces classes est un autre élément négatif. L?emploi du temps ressemble à celui des élèves du primaire : matinées et après-midi entre les quatre murs de leur classe. Des enfants ? ils ne sont pas encores des élèves ? sont assis sagement deux à deux à une table d?école, face au bureau de la maîtresse et du tableau vert (le noir a disparu). Eux qui ont un besoin fort de bouger, sauter, grimper, bref de jouer, se retrouvent muselés, comprimés en vertu d?une idée mal comprise de ce qu?est l?éducation préscolaire. Les quelques activités ludiques visant au développement de leur langage et de leur psychomotricité ne constituent qu?une infime partie du dispositif technico-pédagogique indispensable. Sans entrer dans le détail de la pédagogie du préscolaire ou dans le fonctionnement d?une vraie classe préparatoire, on ne peut que nourrir appréhension et scepticisme. Une visite guidée, voire la seule lecture de l?emploi du temps, nous renseigne sur les retards non pas accumulés, mais programmés. C?est bien vrai que l?Algérie ? depuis l?avènement de l?école fondamentale ? a perdu jusqu?à la notion même d?éducation préscolaire. Il est grand temps d?y remédier. Cela ne coûte pas cher, juste une volonté affirmée de l?intégrer en tant que maillon de base de l?édifice du système éducatif algérien. Et de mettre les moyens, tous les moyens. Sinon, les belles décisions prises dans le cérémonial médiatisé des Conseils des ministres finiront entre les mains d?apprentis-bricoleurs. Et ce n?est pas ce qui manque en Algérie. Historique Trois années après l?Indépendance soit le 23 septembre 1965 (*), un arrêt ministériel décide la suppression pure et simple de l?enseignement préscolaire existant. L?argument avancé est «l?utilisation des moyens disponibles (humains et matériels) afin de réaliser dans les plus brefs délais, la scolarisation totale au niveau de l?enseignement obligatoire». (*) Statistiques n° 11, mars 1973 Meps.