Résumé de la 1re partie n Sur son lit de mort, le marchand Gloire fit des recommandations à son fils unique, Alischar, l?exhortant surtout à bien se conduire et à faire les bons choix dans la vie. Après la mort de son père, Alischar continua le commerce dans la boutique principale du souk, et suivit consciencieusement les recommandations paternelles, notamment en ce qui concernait les relations avec autrui. Mais, au bout d'un an exactement et d'un jour, heure pour heure, il se laissa tenter par les perfides garçons, les adultérins sans vergogne. Et il les fréquenta avec frénésie, et connut leurs mères et leurs s?urs. Et il se plongea jusqu'au cou dans la débauche, et il nagea dans le vin et la dépense, dans une voie bien opposée au droit chemin. Car, n'étant plus dans un état sain d'esprit, il se faisait ce triste raisonnement : «Du moment que mon père m?a laissé toutes ses richesses, il faut bien que j?en use, pour ne pas en faire hériter d?autres après moi ! Et je veux profiter du moment et du plaisir qui passe, car je ne vivrai pas deux fois !» Or, ce raisonnement lui réussit si bien, et Alischar continua si régulièrement à unir le jour et la nuit par leurs extrémités, sans épargner aucun excès, qu'il se vit bientôt réduit à vendre sa boutique, sa maison, ses meubles et tous ses vêtements ; et il ne lui resta que juste les habits qu'il avait sur le corps. Alors il put, en toute évidence, voir clair dans ses errements, et constater l'excellence des conseils de son père Gloire. Les amis qu'il avait fastueusement traités, et à la porte desquels il alla frapper à tour de rôle, trouvèrent tous un motif quelconque pour l'éconduire. Aussi, réduit maintenant à l'extrême limite de la misère, il fut obligé, n'ayant rien mangé depuis la veille, de sortir du misérable khân où il logeait et de mendier de porte en porte, dans les rues. Pendant qu'il cheminait de la sorte, il arriva sur la place du marché, où il vit une grande foule rassemblée en cercle. Il fut tenté de s'en approcher, pour juger de ce qui se passait, et il vit, au milieu du cercle formé par les marchands, par les courtiers et les acheteurs... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement. Elle dit : ...Il vit, au milieu du cercle formé par les marchands, par les courtiers et les acheteurs, une jeune escIave blanche d'une élégante et délicieuse tournure : une taille de cinq palmes, et des roses comme joues, et des seins bien assis ! Aussi pouvait-on lui appliquer, sans crainte de se tromper, ces vers du poète : «Du moule de la Beauté sans défaut elle est sortie ! Ses proportions sont admirables : ni trop grande, ni trop petite, ni trop grasse, ni trop maigre ; et des rondeurs partout. «Aussi la Beauté elle-même se trouva-t-elle éprise de son image que rehaussait le léger voile tamisant ses traits modestes à la fois et hautains. «La lune est son visage ; le flexible rameau qui ondule, sa taille ; et le suave parfum du musc, son haleine. «On la dirait formée de perles liquides ; car ses membres sont si polis qu'ils réfléchissent la lune de son visage, et paraissent eux-mêmes formés de lunes, à leur tour. «Mais où est la langue qui saurait décrire ce miracle de clarté ...?» Lorsque Alischar eut jeté ses regards sur la belle jeune fille, il fut extrêmement émerveillé, et, soit qu'il fût immobilisé par l'admiration, soit qu'il voulût oublier un instant sa misère au spectacle de la beauté, il se mêla à la foule rassemblée qui, déjà, s'apprêtait à la vente. Et les marchands et les courtiers qui étaient là, ignorant encore sa ruine, ne doutèrent pas un instant qu'il ne fût venu pour acquérir l'esclave : car ils le savaient très riche de l'héritage de son père. (à suivre...)