Résumé de la 7e partie n Après une année de bonheur, Alischar, oubliant la recommandation de Zoumourroud, vendit l?un de ses beaux tapis à un inconnu de passage au souk. Tandis qu'il marchait, il s'aperçut à un tournant de rue que le chrétien le suivait. Il s'arrêta et lui demanda : «Qu'as-tu à faire dans ce quartier où n'entrent pas les gens de ton espèce, chrétien ?» Celui-ci dit : «Excuse-moi, ô mon maître, mais j'ai une commission à remplir au bout de cette ruelle. Qu'Allah te conserve !» Alischar continua sa route et il arriva à la porte de sa maison ; et là il s'aperçut que le chrétien, après avoir fait un crochet, était revenu par l'autre bout de la rue, et arrivait devant sa porte au même moment que lui. Il lui cria, pris de colère : «Maudit chrétien, qu'as-tu à me suivre de la sorte partout où je vais ?» Il répondit : «O mon maître, crois bien que c'est par hasard que je suis là encore ; mais je te prie de me donner une gorgée d'eau, et Allah t'en rémunérera, car la soif me brûle l'intérieur !» Et Alischar pensa : «Par Allah ! il ne sera pas dit qu'un musulman ait refusé de donner à boire à un chien altéré ! Je vais donc lui porter de l'eau.» Et il entra dans sa maison, prit une cruche d'eau et allait ressortir pour l'aller porter au chrétien, quand Zoumourroud l'entendit ouvrir le loquet et courut à sa rencontre, émue de son absence prolongée. Elle lui dit, en l'embrassant : «Pourquoi as-tu tant tardé à rentrer aujourd'hui ? As-tu fini par vendre la tapisserie, et est-ce à un brave marchand en boutique, ou à un passant ?» Il répondit, troublé fort visiblement : «J'ai tardé un peu car le souk était plein ; j'ai fini tout de même par vendre la tapisserie à un marchand !» Elle dit, avec un doute dans la voix : «Par Allah ! mon c?ur n'est pas tranquille. Mais où portes-tu cette cruche ?» Il dit : «Je vais donner à boire au crieur du souk qui m'a accompagné jusqu'ici !» Mais cette réponse ne la satisfit point, et, tandis qu'Alischar sortait, elle récita, fort anxieuse, ce vers du poète : «O mon c?ur qui t'attaches à l'aimé, pauvre c?ur plein d'espoir et qui crois éternel le baiser, ne vois-tu qu'à ton chevet, les bras tendus, veille la séparatrice, et que dans l'ombre te guette, perfide, la destinée ?...» Comme Alischar se dirigeait vers le dehors, il trouva le chrétien déjà entré dans le vestibule, par la porte laissée ouverte. A cette vue, le monde noircit devant son visage et il s'écria : «Que fais-tu là, chien fils de chien ? Et comment as-tu osé pénétrer dans ma maison sans mon consentement ?» Il répondit : «De grâce, ô mon maître, excuse-moi ! Epuisé d'avoir marché tout le jour, et ne pouvant plus me tenir debout, je me vis forcé de franchir ton seuil, puisqu'en somme il n'y a pas grande différence entre la porte et le vestibule. D'ailleurs, le temps seulement de prendre haleine, et je m'en vais ! Ne me repousse pas et Allah ne te repoussera pas !» Et il prit la cruche que tenait Alischar fort perplexe, but son besoin, et la lui rendit. Et Alischar resta debout en face de lui, à attendre qu'il s'en allât. Mais une heure se passa de la sorte et le chrétien ne bougeait pas. Alors Alischar lui cria, suffoqué : «Veux-tu tout de suite sortir d'ici et t'en aller en ta voie ?» Mais le chrétien lui répondit : «O mon maître, tu n'es certes pas de ceux qui font un bienfait à quelqu'un pour le lui faire sentir toute la vie, ni de ceux dont le poète a dit : «Evanouie, la race généreuse de ceux qui sans compter remplissaient la main du pauvre avant qu'elle ne fût tendue. «Maintenant c'est une race vile d'usuriers qui supputent l'intérêt d'un peu d'eau prêtée au pauvre du chemin.» (à suivre...)