Résumé de la 13e partie n Zoumourroud offrit ses services à la mère du bandit Djiwân qui finit par s?assoupir, bercée par le mouvement des mains habiles de la jeune fille sur ses cheveux. Sans perdre de temps, Zoumourroud se leva et courut à la caverne où elle prit des vêtements d'homme dont elle s'affubla ; elle s'entoura la tête d'un beau turban, un de ceux qui venaient des vols commis par les quarante, et ressortit en hâte pour aviser un cheval, également volé, qui paissait par là, les deux pieds attachés ; elle le sella et le brida, sauta dessus à califourchon et le mit au grand galop, droit devant elle, en invoquant le maître de la délivrance. Elle galopa ainsi, sans répit, jusqu'à la tombée de la nuit ; et le lendemain, dès l'aube, elle reprit sa course, ne s'arrêtant que de temps à autre pour se reposer, manger quelques racines et laisser paître son cheval. Et elle continua de la sorte pendant dix jours et dix nuits. Vers le matin du onzième jour, elle sortit enfin du désert qu'elle venait de traverser et elle déboucha dans une verdoyante prairie où couraient de belles eaux et où s'égayaient les regards au spectacle des grands arbres, des ombrages et des roses et des fleurs qu'un climat printanier faisait là pousser par milliers ; là s'ébattaient aussi des oiseaux de la création et paissaient par troupeaux les gazelles et les plus jolis des animaux. Zoumourroud se reposa une heure en cet endroit délicieux, puis elle remonta à cheval et suivit une route fort belle qui courait entre les massifs de verdure et conduisait à une grande ville dont au loin, sous le soleil, brillaient les minarets. Lorsqu'elle fut proche des murs et de la porte de la ville, elle vit une foule immense qui, à sa vue, se mit à pousser des cris délirants de joie et de triomphe ; et aussitôt, de la porte, sortirent et vinrent à sa rencontre des émirs à cheval et des notables et des chefs de soldats qui se prosternèrent et embrassèrent la terre avec les marques de la soumission des sujets à leur roi, tandis que, de tous côtés, une clameur immense s'élevait de la multitude délirante : «Qu'Allah donne la victoire à notre sultan ! Que ta bienvenue apporte la bénédiction au peuple des musulmans, ô roi de l'univers ! Qu'Allah consolide ton règne, ô notre roi !» Et en même temps, des milliers de guerriers à cheval firent la haie sur deux rangs, pour écarter et maintenir la foule à la limite de l'enthousiasme, et un crieur public, juché sur un chameau richement caparaçonné, annonçait au peuple, de toute sa voix, l'arrivée heureuse de son roi ! Mais Zoumourroud, toujours déguisée en cavalier, ne comprenait guère ce que tout cela pouvait signifier, et elle finit par demander aux grands dignitaires qui avaient pris les rênes du cheval, de chaque côté : «Qu'y a-t-il donc, honorables seigneurs, dans votre ville ? Et que me voulez-vous ?» Alors, d'entre tous ceux-là, s'avança un grand chambellan qui, après s'être incliné jusqu'à terre, dit à Zoumourroud : «Le Donateur, ô notre maître, n'a point compté ses grâces en te les accordant ! Louanges Lui soient rendues ! Il t'amène par la main jusqu'à nous pour te placer comme notre roi sur le trône de ce royaume ! Louanges à Lui qui nous donne un roi si jeune et si beau, de la noble race des enfants des Turcs, au brillant visage ! Gloire à Lui ! car s'il nous avait envoyé quelque mendiant ou toute autre personne de peu d'importance, nous eussions été également forcés de l'accepter comme notre roi et de lui rendre hommage. Sache, en effet...» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement. Mais lorsque fut la trois cent vingt-quatrième nuit, elle dit : «... Sache, en effet, que notre usage, à nous habitants de cette ville, lorsque notre roi meurt sans laisser d'enfant mâle, est de nous rendre sur cette route-ci et d'attendre l'arrivée du premier passant que nous envoie le destin, pour l'élire notre nouveau roi et le saluer comme tel ! Et nous avons aujourd'hui le bonheur de te rencontrer, ô toi le plus beau de tous les rois de la terre, et l'unique de ton siècle et de tous les siècles !» (à suivre...)